L’Ordre des médecins annonce la création d’un point de contact national permettant aux médecins de notifier les agressions subies dans l’exercice de leur profession. Un formulaire de signalement des incidents est disponible sur son site. L’initiative s’inscrit dans un projet plus vaste, en achèvement pour début août: le service «Médecins en difficulté».
Le Conseil national de l’Ordre ouvre un point de contact pour les cas de violence à l’égard des médecins, dont le nombre, dit-il, prend «des proportions inquiétantes». Il rapporte avoir «régulièrement connaissance d'incidents signalés par des médecins individuels» et recevoir «des alertes de plusieurs cercles de médecins généralistes».
Comme le développe le Pr Jean-Jacques Rombouts, vice-président et porte-parole du Conseil national, cette violence peut revêtir différentes formes et aller d’événements tragiques isolés comme le coup de poignard fatal porté au MG flamand Patrick Roelandt lors d’une visite à domicile en décembre dernier (lire ici) à des faits d’agression verbale devenus monnaie courante.
Mesurer l’incidence et catégoriser
Le Conseil national, conscient qu’il n’existe que des données fragmentaires sur la problématique, va donc s’employer à cartographier et caractériser la violence à l’égard du corps médical. Pour ce faire, il convie les consœurs et confrères qui sont victimes de faits de violence à les lui signaler via un formulaire standard disponible sur son site.
Le document peut être complété anonymement. On y demande au médecin son âge et son sexe, son environnement d’exercice, son type de pratique (solo, groupe, centre de santé, hôpital…) et le lieu précis où est survenue l’agression. Est attendue également la description de l’acte de violence, sa nature (violence physique, psychologique, verbale…), les circonstances dans lesquelles il s’est produit ainsi que sa raison présumée – comme le refus de prescription, le temps d’attente, le vol…. Le formulaire s’enquiert encore des caractéristiques de l’auteur des faits, des conséquences de ceux-ci (dommages corporels, matériels, ITT…) et de la suite donnée par la victime (dépôt de plainte, recherche d’aide médicale/psychologique…).
Une facette d’un plus gros projet
S’agit-il d’un recueil à durée limitée, visant à pouvoir éclairer les autorités pour dresser un plan stratégique (le ministère de l’Intérieur, par exemple, dont l’Ordre est l’un des interlocuteurs sur la question de la sécurité des médecins)? «L’initiative va s’inscrire dans la durée», corrige le Pr Rombouts. «Elle fait partie intégrante d’un projet de grande envergure, appelé ‘Médecins en difficulté’, qui démarrera pleinement cet été. Le Conseil national souhaite apporter du soutien à des confrères qui rencontrent différents types de situations délicates, pas uniquement de la violence. Il y a ceux qui sont confrontés à des problèmes d’alcoolisme ou de burn out, ou encore ceux qui se retrouvent en mauvaise posture parce qu’ils ont commis, par exemple, une erreur médicale et font l’objet de poursuites.» L’idée est de leur proposer l’aide d’une structure indépendante de l’activité disciplinaire de l’Ordre.
Pour animer «Médecins en difficulté», qui aura pour vitrine un site (actuellement en chantier) connexe aux pages web du Conseil national, ce dernier vient d’engager une collaboratrice temps plein, bilingue et à fibre sociale et psychologique. «Elle nous rejoindra le 1er août.» En outre, la structure pourra également s’appuyer sur un réseau de référents, médecins, psychiatres…, vers lesquels aiguiller les confrères en souffrance qui se manifesteront. Le service disposera d’une ligne d’appel gratuite (0800 23460), offrant un point de contact unique. Un peu de patience, donc, avant que ce dispositif ne soit tout à fait sur les rails, conclut Jean-Jacques Rombouts en signalant toutefois qu’il est déjà fonctionnel auprès des conseils provinciaux pionniers en la matière de Flandre orientale et du Brabant wallon, emmenés par leurs présidents respectifs, les Drs Bafort et Machiels.
Initiative en nom propre
Il existe une certaine concurrence dans le soutien aux médecins en difficulté, précise par ailleurs le porte-parole de l’Ordre. «Il y a par exemple en Flandre la structure locale D4D (Doctors for Doctors) qui s’occupe de burn out. L’Inami a plus d’une fois tenté de créer un dispositif analogue. En matière de sécurité, le groupe récemment constitué par les amis du MG décédé, le PRaag (Patrick Roelandt anti-agressie groep), pousse tout le monde à l’action. ‘Médecins en difficulté’ est une initiative propre au Conseil national, sur ses deniers, via les cotisations des membres», qui servent donc une cause d’entraide et de solidarité.