Plan d'action anti-fraude : "nos maisons médicales sont plus contrôlées et contrôlables" ( F.Dubois )

La Commission anti-fraude de l'Inami a récemment publié son « Plan d’action en matière de contrôle des soins de santé 2024-2026 » Ce Plan aborde notamment les stratégies de certaines maisons médicales en matière d’inscription et de désinscription des patients sans leur consentement, et donc le risque de sélection des patients selon leur profil et leurs pathologies, les situations les plus lourdes étant considérées comme moins « rentables ». Le Plan met aussi en avant la tendance de certaines maisons médicales « à se comporter de plus en plus comme des établissements commerciaux » (fusions, multipropriétaires, statuts qui visent d’autres objectifs que la prestation de soins, etc.).

La Fédération des maisons médicales et des collectifs de santé francophone, fédération majoritaire du secteur qui regroupe 135 maisons médicales à Bruxelles et en Wallonie, tient à réagir à ces propos. Les maisons médicales de notre Fédération dispensent, depuis plus de cinquante ans, des soins de première ligne de qualité, accessibles, continus, globaux et intégrés. Concrètement, elles accueillent aujourd’hui près de 300.000 patients, parmi lesquels les personnes les plus exclues du système de santé : la moitié des patients de nos maisons médicales ont un statut BIM (bénéficiaires de l’intervention majorée, à savoir des bénéficiaires du revenu d’intégration sociale, de la GRAPA, des chômeurs longue durée, des ménages avec un faible revenu, etc.), contre un quart de patients BIM en moyenne en médecine générale.

Contrairement à beaucoup d’institutions de soins financées par l’INAMI (comme les hôpitaux ou la médecine libérale), nos maisons médicales font l’objet de contrôles rigoureux via les rapports financiers annuels qu’elles doivent rendre à l’INAMI. Elles sont plus contrôlées et contrôlables que les autres secteurs parce qu’elles jouent le jeu de l’efficience pour que l’argent public qui transite par elles puissent être utilisé à bon escient. 

La Fédération s’inquiète néanmoins des risques de commercialisation et de sélection des patients dans les soins de santé de première ligne, notamment dans le cadre du financement forfaitaire. A l’instar de ce qui a pu se produire dans le secteur des maisons de repos où l’on a vu se développer une vaste offre commerciale privée au détriment de l’accessibilité et de la qualité de la prise en charge des personnes, nous sommes préoccupés par l’importance grandissante des structures forfaitaires à visée commerciale dans divers territoires.

Des critères qui régissent l’accès à ce mode de financement doivent être établis afin de garantir la qualité des soins pour toutes et tous dans une logique non lucrative. Nous sommes d’ailleurs demandeurs d’un cadre légal à ce sujet. Sous cette législature, un projet de loi rédigé en concertation avec les fédérations du secteur, les mutuelles, l’INAMI et le cabinet du ministre de la Santé Frank Vandenbroucke pour assurer une meilleure régulation de la qualité en maison médicale, a été donné sans suite par la majorité gouvernementale. 

Plus largement, nous observons aussi que la lutte contre la fraude visant les secteurs ou les personnes les plus vulnérables ne fait que s’intensifier ces dernières années (lutte contre la fraude sociale par ex.). Cette montée en puissance se traduit par l’extension des modalités de contrôle, qui supposent un investissement non négligeable en ressources financières et humaines, mais aussi une augmentation du travail administratif pour les structures de soins de première ligne. Or, nous ne pouvons que constater que les efforts en matière de lutte contre la fraude ne sont pas toujours déployés avec le même zèle selon le type de fraude dont il s’agit, certaines d’entre elles bénéficiant d’une approche plus complaisante que d’autres.

> Lire aussi: Commission anti-fraude : des actions prévues pour les maisons médicales

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Derniers commentaires

  • Nathalie PANEPINTO

    22 avril 2024

    Est-ce le rôle des médecins de combattre les injustices sociales ? Peut-être ? Est-ce que c'est le mandat que la société nous donne ? Certes, beaucoup de maladies sont provoquées par les injustices. Mais qui décide de ce qui est juste ou pas ? Le médecin lors du colloque singulier sans regard extérieur dans un esprit 'Robin des Bois' ? Quel est votre avis sur ces questions ? Et quid du "Health in all politics" (https://iris.who.int/bitstream/handle/10665/332623/Eurohealth-23-3-6-8-eng.pdf?sequence=1). Un voeu pieux ?