La Chambre des représentants a consacré jeudi une large séquence de ses travaux à la question des malades de longue durée, interpellant longuement le ministre fédéral des Affaires sociales et de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit). Plusieurs députés, dont Florence Reuter (MR), Sofie Merckx (PTB), Axel Ronse (N-VA) et Irina De Knop (Open Vld), ont interrogé le ministre sur les constats récents de l’INAMI concernant les abus présumés dans le régime d’incapacité de travail et sur l’explosion des coûts pour la sécurité sociale.
Florence Reuter a rappelé que « plus de 500 000 personnes » sont aujourd’hui reconnues comme malades de longue durée, soit près de 10 % de la population active, un chiffre supérieur au nombre de chômeurs. Elle a qualifié de « chiffres accablants » les résultats de l’échantillon analysé par l’INAMI, montrant que seuls 16 % des personnes inscrites jusqu’à leur pension sont totalement invalides, tandis que 25 % pourraient reprendre une activité. « La solidarité doit aller de pair avec la responsabilité », a insisté la députée libérale, appelant à des contrôles renforcés.
Irina De Knop a, de son côté, dénoncé une situation « fondamentalement incorrecte », soulignant que la Belgique compte autant de malades de longue durée que l’Allemagne, pays pourtant huit fois plus peuplé. Elle a mis en avant « un coût annuel de près de 15 milliards d’euros, soit trois fois le budget du chômage ».
Pour Sofie Merckx, la logique gouvernementale repose sur « une économie de 5 milliards d’euros sur le dos des malades », alors que le PTB propose de « taxer les multimillionnaires ». Elle a rappelé que le revenu moyen d’un malade de longue durée s’élève à environ 1 300 euros par mois, jugeant inacceptable de réduire encore ce soutien. Elle a en outre pointé les conditions de travail difficiles dans certains secteurs, citant celui des aides-ménagères, où 11 % des travailleurs sont en incapacité de longue durée.
Axel Ronse a salué l’action actuelle du ministre, rappelant que « plus de la moitié » des personnes contrôlées et reconnues invalides jusqu’à la pension l’étaient « à tort », selon une étude de l’INAMI portant sur 1 800 dossiers. « Le Parlement a droit à la vérité, car ce sont les cotisations des travailleurs qui sont en jeu », a-t-il déclaré, appelant à responsabiliser aussi les mutualités.
Face à ces critiques, Frank Vandenbroucke a défendu une approche « stricte mais juste ». Il a rappelé qu’une première vague de mesures avait déjà permis de créer les coordinateurs retour au travail, puis de limiter la reconnaissance d’invalidité jusqu’à la pension. Une « troisième vague » est en cours, mobilisant médecins du travail, employeurs et soignants pour accompagner le retour à l’emploi. Une « quatrième vague » doit encore renforcer l’accompagnement après un an d’invalidité et responsabiliser financièrement les mutualités lorsque des abus sont constatés.
Le ministre a insisté sur le fait que « l’absentéisme de longue durée est avant tout un problème de santé publique, le plus important de notre époque ». Il a affirmé être favorable à « des règles strictes et équitables pour tous, y compris pour les employeurs », citant l’exemple de l’Allemagne où ceux-ci prennent déjà en charge six semaines d’indemnisation.
Le débat a donné lieu à plusieurs échanges vifs. Paul Magnette (PS) a reproché à Axel Ronse de « caricaturer les malades en fainéants », soulignant que les conditions de travail pénibles étaient à l’origine de nombreux arrêts de longue durée. « Ces travailleuses et travailleurs méritent notre respect et notre gratitude », a-t-il martelé. Ronse a répliqué en appelant à « protéger la sécurité sociale des abus » afin que les moyens bénéficient à ceux qui sont réellement malades.
Les projections budgétaires rappellent l’urgence : selon Florence Reuter, si rien n’est fait, le coût des indemnités de maladie atteindra « au moins 19 milliards d’euros d’ici 2030 ». Le ministre a conclu en appelant à « sortir du défaitisme », rappelant qu’environ 100 000 personnes en incapacité sont déjà revenues partiellement au travail.
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