Après la publication des premiers résultats de l’enquête menée par Medi-Sphère et Le Spécialiste sur le projet de loi-cadre du ministre de la Santé Frank Vandenbroucke, les syndicats médicaux ont réagi. L’ABSyM dénonce une attaque frontale contre la médecine libérale et évoque la possibilité d’actions si le texte reste inchangé. Le GBO, de son côté, reconnaît la profondeur du malaise exprimé, tout en appelant à une mobilisation élargie pour répondre aux problèmes structurels de la première ligne.
Dans cette enquête, un rejet plus marqué chez les francophones est observé, « mais dans les faits, il l’est tout autant chez les néerlandophones (cfr les nombreux retours de notre base tant via les réseaux sociaux que par contacts directs). » indique le Dr Patrick Emonts, président de l’ABSyM.
86% des médecins répondants estiment que ce projet de loi cadre doit être retiré ou complètement réécrit. « Cela montre bien que la vision du ministre ne correspond pas à la réalité du terrain. Les deux premières mesures citées par les répondants comme étant des points de rupture sont la menace de retrait du numéro INAMI (59 %) et la restriction du droit de fixer librement ses honoraires (58 %). Il est en effet indispensable de pouvoir fixer les honoraires en fonction du coût du matériel et de l’investissement personnel du médecin. Il est aussi inacceptable que le ministre puisse faire en sorte que le médecin perde son numéro INAMI alors que des organes de contrôle sont prévus à cette fin. » commente le Dr Emonts.
Près de 8 médecins sur 10 de l’enquête considèrent que « le projet sape complètement le principe de la médecine libérale, ce qui renforce bien l’idée du glissement vers une médecine étatique. La mise en péril grave des soins de santé fait dire à plus de 55% des répondants qu’ils sont prêts à des actions fortes, allant même jusqu’à la grève nationale si projet demeure en l’état. » ajoute encore le président de l’ABSyM.
Un fossé énorme
L’ABSyM planche sur différentes actions si le ministre reste sur ses positions. « Pour près de 80% des répondants, ce projet risque de décourager les jeunes médecins de s’installer ou de rester en Belgique. Ils se rendent en effet compte du fossé énorme entre leur investissement, leurs attentes et la teneur de ce texte. »
En conclusion, « ce projet de loi-cadre est tout à fait prématuré alors que les réformes de la nomenclature et du financement hospitalier ne sont pas encore abouties et qu’elles vont impacter toute l’organisation des soins de santé. A vouloir agir dans l’empressement, le ministre risque d’anéantir la qualité et l’accessibilité de nos soins de santé. » précise le Dr Patrick Emonts.
GBO: une mobilisation pour résoudre les problèmes
De son côté, le GBO prend acte des résultats du sondage. La Dr Anne Gillet, présidente du GBO tire un premier constat : « Les spécialistes sont 71% et les généralistes sont 26% parmi les répondants. Dont 49% de conventionnés, 41% de déconventionnés et 10% de conventionnés partiellement. Or, les généralistes sont très majoritairement conventionnés (92% pour l'accord 2024-2025, totalement et partiellement), un peu moins pour les spécialistes (81%). Ceci pose la question d’une réelle mobilisation si les syndicats ne réussissent pas à faire bouger les lignes dans les négociations, en particulier concernant l’autonomie et la sécurité juridique des médecins. »
Toutes démarches facilitant la pratique professionnelle et l'accessibilité aux soins même les plus sophistiqués si c'est nécessaire, dans le respect du principe d'équité, permettent de trouver du sens et assurer l’aisance professionnelle. « Or ce qui nous pose le plus de problème aujourd'hui, ce sont la pénurie des généralistes (ne l'oublions pas, suite à l'obstination de politiques, de certains syndicats et des universités qui ont produit trop peu de généralistes), les prix démentiels de certains médicaments, l'exagération de certains suppléments, l'indisponibilité de certains spécialistes par manque d'échelonnement, la non-reconnaissance du temps long en consultation, de certains actes techniques et des formations complémentaires coûteuses qui pousse certains au déconventionnement et pourrait en pousser d’autres demain... »
Une large solidarité
Le GBO espère une même mobilisation pour résoudre ces problèmes et défendre la médecine générale malmenée, pivot du système des soins, que celle, ici, pour s’opposer à la régulation non concertée des suppléments. « Nous défendons le principe de la plus large solidarité au sein de la sécurité sociale. Les médecins sont subsidiés par l’État par les remboursements qu’il accorde aux prestations. Cela ne doit pas lui faire oublier qu’il doit se soucier de ses prestataires. Les honoraires indécents en garde sont un exemple du peu de considération de sa part pour certaines prestations. Les médecins désirent dans l’immense majorité être responsables socialement...si on leur en donne les moyens! »
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