Le Comité de l’assurance de l’INAMI a rejeté lundi le projet de budget 2026 des soins de santé, qui prévoyait une économie de 900 millions d’euros, dont 150 millions à charge des honoraires médicaux. C’est ce qu’indiquent l’ABSyM et le Cartel (ASGB/GBO/MODES) dans deux communiqués publiés lundi.
Selon l’ABSyM, les économies exigées des médecins sont « excessives » et les propositions formulées par le syndicat au cours des dernières réunions n’ont pas été retenues. Avec 11 votes contre et 9 pour sur le banc des prestataires, la proposition a été rejetée. L’ABSyM souligne que les dépassements constatés du côté des médecins s’élèvent à 31 millions d’euros, alors que le ministre Frank Vandenbroucke leur demande 150 millions d’euros d’économies supplémentaires, en plus des 72,5 millions déjà réalisés pour 2025 et des 62 millions qui doivent être restitués au 1er janvier 2026.
« Nous sommes d’accord de participer à l’effort nécessaire pour maintenir le budget des soins de santé à flot, mais nous ne pouvons pas être le banquier des soins de santé. L’effort doit être mieux réparti », commente le Dr Patrick Emonts, président de l’ABSyM. Le syndicat rejette aussi la dernière proposition avancée par les mutualités, qui consistait à accepter ces 150 millions d’euros d’économies en contrepartie d’une augmentation du ticket modérateur d’un euro à partir de 2027. « Cela n’offre pas suffisamment de garanties, car à plusieurs reprises déjà des promesses à moyen terme n’ont pas été tenues », relève l’ABSyM.
Pour le GBO " Il est totalement exclu d’imaginer augmenter le ticket modérateur de la médecine générale, si le budget dégagé n’a pas la garantie absolue de revenir à la médecine générale (par exemple pour refinancer la phono-consultation), contrairement à ce que certains souhaitent." Le GBO a également fait des propositions "pour diminuer les examens inutiles ou en doublons, pour favoriser un échelonnement des soins pourvoyeur d’amélioration de qualité, de diminution de la iatrogénicité et in fine d’économies, particulièrement pour les soins non planifiables, pour diminuer le gaspillage (avec des conséquences économiques et écologiques importantes) des médicaments (par exemple, cela fait 30 ans que nous demandons la prescription à l’unité…)."
L'ABSyM se dit par ailleurs inquiet des réformes en cours. « Pour l’instant, nous sommes encore dans le flou total. Nous ne savons pas ce que la réforme de la nomenclature va nous apporter. Pour certaines spécialités, on parle d’une diminution des revenus des médecins qui pourrait aller jusqu’à 30%. Nous ne savons pas non plus sur quoi va déboucher la réforme du financement des hôpitaux. Et enfin, les suppléments d’honoraires font toujours l’objet de négociations au sein desquelles le ministre semble ne pas vouloir comprendre que la suppression des suppléments en ambulatoire mettrait complètement en péril la qualité des soins et la survie de bon nombre de cabinets médicaux », ajoute Patrick Emonts.
Le Cartel a également voté contre le projet, estimant que la lettre de mission du gouvernement, sur laquelle il reposait, fixait déjà la ventilation des économies et « vidait la concertation de son sens ». Le syndicat juge « arbitraire » l’effort de 150 millions imposé aux médecins et regrette que ses propositions sur les tickets modérateurs et sur des mesures concernant les volumes n’aient pas été retenues.
Le Cartel critique encore « la méthode de travail de dernière minute » menée sous l’impulsion des mutualités, ainsi que l’absence de débat sur d’autres postes budgétaires en dépassement, comme les soins transversaux, le New Deal ou les maisons médicales. Il déplore aussi la réaffectation tardive des 50 millions d’euros destinés aux hôpitaux, initialement prévus pour financer le secteur du jour hospitalier, puis transformés en montants non affectables.
Pour les deux syndicats médicaux, le chiffre de 150 millions est « arbitraire » et la répartition de l’effort déséquilibrée. « Le calendrier des économies proposé n’offre pas de garanties suffisantes pour notre secteur », conclut le Dr Emonts.
La Mutualité chrétienne a, pour sa part, déploré cette décision. "La proposition budgétaire présentée était le résultat d'un processus rigoureux et approfondi, dans lequel nous avons laissé la place à différentes options", a déclaré Élise Derroitte, vice-présidente de la Mutualité chrétienne. "Les prestataires qui ont voté contre la proposition préfèrent remettre leur sort entre les mains des politiques plutôt que dans le modèle de concertation. Ce sont les patients qui en feront les frais".
Pour Solidaris, l'absence d'accord illustre "à quel point le cadre budgétaire actuel rend la concertation extrêmement difficile". "Mais la réalité est claire : sans nouvelles recettes, nous ne pourrons pas préserver un système de santé accessible et solidaire", a déclaré Jean-Pascal Labille, secrétaire général de Solidaris.
La mutualité socialiste ajoute dans son communiqué que la concertation est vouée à l'impasse "tant que l'effort budgétaire reposera exclusivement sur les économies".
Le gouvernement fédéral doit désormais soumettre sa propre proposition budgétaire au Conseil général le 21 octobre.
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