La médecine générale est-elle prête à accompagner les personnes trans ?

Lors du premier congrès de médecine générale du CMG à Namur, le Dr Laszlo Guillaume a alerté sur les lacunes dans la formation des assistants généralistes concernant la prise en charge des personnes transgenres. Selon lui, ce manque d’enseignement conduit à des soins inadaptés et renforce la stigmatisation, tout en compliquant l’accès aux soins pour ces patients.

Aujourd’hui, durant leurs études, les assistants généralistes ne sont pas formés à une prise en charge optimale des patients trans. C’est en tout cas le constat du Dr Laszlo Guillaume, généraliste, qui a présenté son mémoire de master en spécialisation en médecine générale (Évaluation de l’impact d’une courte intervention à propos des transidentités auprès d’assistants en médecine générale de l’ULB). Ce travail s’est penché sur l’impact d’une intervention précisément à ce sujet. « Cela a des conséquences, comme le report de demande de soins de santé. Les besoins de santé des personnes transgenres ne sont pas remplis par le monde soignant.

Il y a actuellement un échec du monde universitaire en matière de formation. J’ai voulu savoir comment améliorer la formation des assistants. Aujourd’hui, 40 % des médecins assistants sondés à l’ULB (dans mon mémoire) considèrent qu’ils doivent être mieux formés. Face au patient, 30 % des médecins assistants essaient une communication non genrée pour démarrer une consultation inclusive... mais la majorité n’essaie pas. »

Ce manque de formation et d’information a inévitablement un impact sur les soins : « 70 % des médecins assistants sont incapables de citer une hormone ou un médicament utilisé dans le cadre des transitions des personnes transgenres. Les trois quarts des assistants sont incapables de citer une ASBL d’accompagnement pour orienter un patient ou une patiente qui le demanderait. »

Sur le terrain, cela amène les patients transgenres à devoir expliquer aux soignants les soins qui peuvent leur être proposés et les spécificités médicales. « Le premier frein d’accès aux soins de santé pour les personnes transgenres, c’est le manque de formation des soignants. »

Les craintes des soignants et les solutions

Plus inquiétant pour les patients trans, « certains étudiants en médecine notent même qu’ils envisagent de ne pas soigner les personnes transgenres, parce que cela entre en contradiction avec leurs convictions personnelles ». Pour le Dr Laszlo Guillaume, il est possible d’améliorer la formation en « introduisant des données spécifiques dans les cours de cardiologie, d’endocrinologie... pour dépathologiser la transidentité. Il faut aussi améliorer la prise en charge générale de la transidentité au travers de jeux de rôle pour les futurs généralistes, afin de diminuer la transphobie des soignants en augmentant leurs expériences cliniques. Parallèlement, il est urgent d’améliorer l’expertise des professeurs qui donnent ces cours pour mieux former les médecins, car ils manquent eux-mêmes d’expérience personnelle. »

Cette réflexion sur la formation, le Dr Maxence Ouafik, médecin généraliste, l’applique aujourd’hui sur le terrain. Il avait commencé une thèse de doctorat sur la question en même temps que son assistanat en 2019. Actuellement, avec Alix Fournier, sociologue au sein de l’ASBL Face à Toi Même, ils proposent une formation complète à destination des professionnels du secteur médical. « Le manque de formation des médecins amène à ce que le soignant ne soit pas à l’aise, ce qui complique la relation thérapeutique. Par ailleurs, pour nous, il est important de rappeler que ce type de soins dépend aussi de la première ligne et pas seulement des hôpitaux universitaires. »

Des formations pratiques

Concrètement, ils proposent une formation en cinq modules : « Aujourd’hui, les associations trans incitent les médecins à participer aux formations, tant la carence est importante sur le terrain. Nous faisons participer des bénévoles trans pour éclairer les soignants. Nous voulons multiplier les espaces de soins, réduire les délais de prise en charge et diminuer la stigmatisation des patients au sein des systèmes de soins. Le généraliste doit être capable de parler avec son patient d’une prise en charge hormonale, de la question des chirurgies, mais aussi de la prévention des MST... Il faut mêler le savoir biomédical et les sciences humaines et sociales. »

Enfin, ce public peut aussi connaître des difficultés d'accès au dossier médical. En effet, le changement administratif complique souvent l'accès.

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