Rémunération des médecins, démographie médicale, allocations diverses… tout cela fonctionne-t-il de manière adéquate ? On peut se poser la question. Le Dr Luc Herry (ABSyM) nous fait part de ses questions et réflexions. Selon lui, on pourrait sans nul doute mieux faire.
Une des questions à l’ordre du jour est celle de la phono-consultation et de son remboursement. Plusieurs propositions ont été mises sur la table. À l’ABSyM, nous sommes favorables à une rémunération à l’acte, ce qui est contrôlable et permettra de déterminer s’il y a des exagérations. En tout cas, nous sommes opposés à la forfaitarisation. C’est incontrôlable, et il y a un risque que des confrères prennent le forfait sans prester la moindre phono-consultation. De toute façon, cela ferait exploser le budget.
Un système unique pour les généralistes
C’est bien là que la question des phono-consultations débouche sur celle, plus globale, du budget des soins de santé, en particulier le poste des honoraires médicaux. Pour l’ABSyM, il faudrait appliquer un système de rémunération unique pour les généralistes, qu’il s’agisse d’honoraires à l’acte, de forfait ou d’un système mixte de type New Deal. Mais tous devraient être soumis à ce système unique. La coexistence de trois modes de rémunération ne va pas sans poser des problèmes et créer des inégalités.
Prenons comme exemple le refus de nouveaux patients, question sur laquelle le ministre Vandenbroucke nous a interpellés. Politiquement, on comprend aisément qu’un tel refus ne soit pas acceptable à ses yeux. Mais si on regarde les chiffres de la médecine forfaitaire, on constate qu’il existe dans cette modalité un médecin pour 400 à 600 patients. En médecine hors forfait, le ratio est de l’ordre d’un médecin pour 1 000 patients. Si on devait appliquer hors forfait la densité médicale de la médecine au forfait, il faudrait quelque 26 000 généralistes supplémentaires. Autant dire que le système au forfait est générateur de pénurie de généralistes.
Sans compter, pour revenir aux modes de rémunération, qu’un système au forfait risque d’amener les médecins à refuser de nouveaux patients une fois qu’ils ont atteint leur niveau de « rentabilité ».
Des médecins de plus en plus tentés par d’autres activités
Voilà donc un exemple frappant. Mais il y a des cassures à tous les niveaux. Sur le terrain, nous le voyons et nous le vivons, mais le monde politique ne semble pas en avoir conscience. Prenons encore un exemple. Le nombre de médecins qui pratiquent la médecine générale à temps partiel seulement n’est pas négligeable.
Mais combien de patients voient-ils ? Le nombre de contacts-patients qu’ils ont est-il suffisant pour maintenir une formation de qualité ? Il serait utile d’imposer un nombre minimum de contacts par an pour pouvoir maintenir son accréditation.
Le temps curatif, chez bon nombre de ces confrères qui occupent d’autres fonctions, est en voie de régression. Le curatif étant mauvais rémunérateur, de plus en plus sont tentés de faire autre chose. C’est un peu à l’exemple des dermatologues, qui se tournent de plus en plus vers l’esthétique.
Une perte d’efficience du système de couverture sociale
Ce ne sont là que deux exemples parmi d’autres, qui illustrent la perte d’efficience de notre système de couverture sociale. On pourrait encore s’interroger sur les incapacités de longue durée. Outre la question, fort débattue, de la remise au travail, combien de bénéficiaires ne jouissent-ils pas de longs séjours à l’étranger, dans des pays où la vie est moins chère ?
Et cela tout en touchant leurs allocations. Ne remettons pas en question l’aide à ceux qui en ont besoin, mais nous pouvons faire un constat : l’argent de ces allocations est, dans certains cas, dépensé ailleurs et profite donc à d’autres pays qu’à celui (le nôtre) qui a la charge de ces allocations…
S’ils restaient (plus longtemps) au pays, les bénéficiaires « expatriés » contribueraient mieux au budget de la Belgique.