Dans une carte blanche publiée ce mardi 19 novembre dans Le Soir, les Drs Johan Blanckaert et David Simon de l’ABSyM alertent sur les risques liés à la revendication des pharmaciens d’accéder aux notes personnelles des médecins, incluant les maladies traitées et les arrêts de traitements. Ils dénoncent une mesure dangereuse et inutile pour la sécurité des patients.
Les représentants des pharmaciens, soutenus par la plateforme eHealth, l’Inami, le ministère de la Santé et le Cabinet du ministre, estiment que connaître la maladie contre laquelle chaque médicament est prescrit par un médecin permettrait aux pharmaciens et aux autres professionnels des soins de santé de renforcer leur fidélité à leur traitement et d’éviter un grand nombre de complications, d’hospitalisations, voire de décès résultant d’allergies, d’intolérances, d’interactions ou de contre-indications. Et ce de trois façons :
- Encourager le patient à ne pas interrompre un médicament prescrit contre une maladie que ces professionnels jugeraient plus importante que les autres ;
- Conseiller au patient de ne plus prendre un médicament dont l’indication ne semble pas appropriée ;
- Conseiller au patient de poursuivre un médicament dont ils estiment que le médecin a erronément conseillé l’arrêt.
Une critique sans appel de l’ABSyM
Pour l’ABSyM, cette revendication comporte des dangers majeurs. « Ces conseils seraient prodigués sans réelle compétence clinique, diagnostique, thérapeutique, ni maîtrise des interactions de plusieurs maladies entre elles », soulignent les Drs Blanckaert et Simon. Selon eux, cette ingérence risque de pousser des patients à interrompre des traitements indispensables ou, à l’inverse, à poursuivre des médicaments nuisibles, voire dangereux.
Ils rappellent que l'accès au SUMEHR , contenant des informations clés telles que les allergies, intolérances et contre-indications, est prévu dans un avenir proche pour les pharmaciens, kinés, infirmiers. « Ces données suffiront pour éviter les complications évoquées, sans qu’il soit nécessaire d’accéder aux notes personnelles du médecin », insistent-ils.
Des inquiétudes autour de Farmaflux
L’ABSyM met également en lumière les risques liés à la gestion des données par l’ASBL Farmaflux, une structure dirigée par des administrateurs issus des organisations représentatives des pharmaciens. Farmaflux a été chargée de gérer l’infrastructure qui hébergera ces données et possède une longue expérience dans la récolte et le traitement statistique des médicaments délivrés dans les pharmacies. Ces données sont transmises, tantôt anonymisées, tantôt « pseudonymisées », aux « décideurs » mais aussi à des « tiers ».
Les auteurs rappellent qu’au cours de la pandémie, l’autorisation donnée à Farmaflux de traiter les données personnelles concernant l’état vaccinal des patients afin de les convaincre d’accepter la vaccination avait suscité un tollé. « Ce précédent doit inspirer la plus grande prudence », écrivent-ils, soulignant que les revendications actuelles des organisations représentatives des pharmaciens ne se limitent plus à la vaccination contre le coronavirus, mais visent désormais toutes les maladies contre lesquelles un médicament est prescrit.
Une opposition ferme et motivée
Pour l’ABSyM, ni la maladie pour laquelle un médicament est prescrit, ni les raisons justifiant son arrêt, ne doivent être accessibles aux pharmaciens, infirmiers, kinésithérapeutes ou dentistes. « Ces informations constituent des notes personnelles du médecin qu’à ce jour seuls le médecin et le patient ont le droit de consulter », concluent les Drs Blanckaert et Simon.
Alors que cette demande relance les débats sur la gestion des données médicales, l’ABSyM appelle à préserver la confidentialité et à protéger les droits des patients face à une revendication qu’elle juge disproportionnée et risquée.
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