Le Dr Emmanuel Graulich est fraîchement promu spécialiste en médecine générale à l’Université de Liège. Il vient d’opter pour le lieu de son installation. Son choix a été mûrement réfléchi et il nous fait part de sa réflexion préalable à son implantation en Hesbaye. Il discute pour nous les avantages et les inconvénients respectifs d’une pratique urbaine et d’une pratique rurale.
Chaque type de pratique a ses avantages et ses inconvénients. En pratique rurale, avec l’avancée en âge d’un grand nombre de médecins généralistes, le risque est réel de se retrouver isolé. Les déplacements peuvent être longs, ainsi que les consultations. Et si on ne prend pas le temps pour des consultations longues, les patients habitués à cela par les médecins qui nous ont précédés risquent de ne pas apprécier. Dès lors, faire le travail « à l’ancienne » ne laisserai pas beaucoup de temps pour les loisirs. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, auquel notre génération tient beaucoup, pourrait être plus difficile à atteindre. Tout cela sans compter qu’avec la féminisation de la profession, un certain nombre de médecins, à savoir nos consoeurs, seront moins disponibles que dans le temps passé.
Un autre inconvénient de la pratique en milieu rural est l’éloignement par rapport aux hôpitaux. Il est plus malaisé d’envoyer les patients pour certains examens, l’imagerie par exemple. Il est plus difficile aussi d’obtenir rapidement des résultats de ces examens. Mais il y a des avantages également : on voit des pathologies plus variées et on réalise plus d’actes techniques, comme la petite chirurgie. Cet aspect- là me convient bien mais je reconnais que c’est une question d’attrait personnel vers ce type de prestations. Personnellement, je préfère être installé au milieu des vergers plutôt qu’au milieu des immeubles. En ville, on a peu de visites à domicile, ce qui représente une facilité. Mais les liens sociaux sont plus ténus, alors que les problèmes sociaux sont plus nombreux.
Il est fort probable aussi qu’à la campagne, les relations humaines soient plus profondes et plus intenses pour qui sait nouer de bons contacts. Et cela se retrouve aussi, sans doute, dans des situations plus difficiles comme l’accompagnement des patients en soins palliatifs. Et surtout, dans la pratique quotidienne, on n’est pas réellement isolé si on travaille en équipe avec des confrères et d’autres professionnels de la santé : infirmières, kinésithérapeutes… Dans ces conditions, le travail peut même être agréable. Et l’équilibre entre profession et vie privée devient parfaitement gérable.
Solo ou en groupe ? J’ai veillé à effectuer des stages dans les deux types de pratique. Je peux donc faire la comparaison. Il serait d’ailleurs utile qu’on incite (ou oblige ?) tous les futurs généralistes à faire des stages dans ces deux milieux. Cela leur permettrait de choisir en connaissance de cause. Et cela attirerait certainement plus de généralistes vers les zones rurales. Pour ma part, après ces réflexions, j’ai décidé de m’installer à Amay. On peut dire que c’est un endroit mi-urbain, mi-rural. Mais j’ai fermement l’intention de travailler en équipe.