Les médecins généralistes doivent être encore plus attentifs aux problèmes de santé de leurs patients susceptibles d’impacter leur travail, estime la Dre Sandrine Ruppol, médecin du travail. Lors du symposium REMEDES, ce samedi à l’UCL, elle les a encouragés à réagir rapidement face aux signes pouvant affecter la capacité à travailler, en incitant leurs patients à solliciter une consultation spontanée au plus tôt. Un tel suivi permettrait de prévenir l’aggravation des pathologies et de favoriser le maintien en emploi.
Le nombre de salariés, indépendants et chômeurs en invalidité est passé de 447 867 à 526 507 personnes, soit une progression de 17,56 %. Il faut savoir que, d’ici 2035, ce chiffre devrait atteindre 600 000 personnes, selon le Bureau du Plan. « Nous devons travailler ensemble pour réfléchir à la prise en charge et au retour au travail », explique la Dre Sandrine Ruppol, médecin du travail et responsable du centre de compétences, de recherche et de documentation au CESI, lors du symposium sur la prévention organisé par RESUMES asbl ce week-end.
La consultation spontanée
Pour elle, les médecins généralistes doivent être encore plus attentifs aux problèmes de santé de leurs patients susceptibles d’impacter leur travail. Il convient donc de bien connaître l’activité professionnelle de son patient : « Nous encourageons les généralistes à réagir très vite. Lorsqu’ils voient un patient présentant un problème de santé pouvant affecter sa capacité à travailler, il faut l’encourager à demander une consultation spontanée le plus rapidement possible. Cela permettra de limiter l’aggravation du problème et d’assurer son maintien au travail. »
L’échec de la réintégration au travail
Pour la Dre Valérie Libotte, médecin du travail : « Nous sommes l’un des mauvais élèves de l’Europe. Les chiffres continuent d’augmenter. En 2035, cela pourrait représenter un coût de 13 milliards d’euros. Nous en sommes aujourd’hui à 8 milliards d’euros. Les patients souffrent notamment, pour un tiers, de troubles musculo-squelettiques, un tiers de problèmes de santé mentale et un tiers de cancers, de maladies neurologiques, cardiovasculaires et de divers traumatismes. »
Elle revient sur la réintégration des travailleurs : « Sur cinq années d’étude, on constate un taux d’échec de 68 % dans le trajet de réintégration. Plus le démarrage de ce trajet est tardif, plus il est compliqué de ramener le travailleur sur son lieu de travail. Plus l’incapacité se prolonge, plus les chances de sortie de l’incapacité de travail diminuent, en particulier après six mois d’absence. Dès trois mois d’incapacité, les chances de retour au travail diminuent considérablement. Pour améliorer cette situation, il faut, par exemple, renforcer la prise en charge multidisciplinaire autour du travailleur, comme cela se fait avec succès au Canada. »
La visite de pré-reprise
Pour la Dre Libotte, il est essentiel que les généralistes pensent à la visite de pré-reprise : « Il existe trois étapes clés en matière de prévention : le plan de prévention personnel, le maintien au travail grâce à la consultation spontanée et, pour le retour au travail, la visite de pré-reprise. Ce n’est pas une consultation médicale, mais une rencontre entre le travailleur et le médecin du travail pour faire le point sur la situation et les possibilités dans l’entreprise. Il faut la promouvoir, car elle est bien plus efficace qu’un trajet de réintégration. Il ne faut jamais hésiter à la demander. »
L’indépendance légale du conseiller en prévention
Sandrine Ruppol rappelle l’importance du lien entre le généraliste et le médecin du travail : « Nous ne sommes ni un médecin-conseil ni un médecin de contrôle. Notre mission est de veiller à ce que le risque auquel est exposé le patient sur son lieu de travail n’impacte pas sa santé. Le patient peut toujours se connecter, pour plus de confidentialité, sur le site de SEED-Connect (www.seed-connect.be), où il pourra trouver le nom et les coordonnées d’un médecin du travail ou d’un conseiller en prévention pour les aspects psychosociaux. Ces contacts peuvent avoir lieu sans passer par l’employeur. »
Lire aussi: Symposium RESUMES : vers une consultation préventive annuelle pour tous ?