La divergence de point de vue affichée par l'Ordre des médecins avec un récent arrêt de la Cour de cassation à propos du secret professionnel et de la protection des mineurs vulnérables pourrait bien n’être qu’une tempête dans un verre d'eau. Elle pourrait tenir à... une erreur de traduction. C'est ce qu'a remarqué Willem Ceuppens, un de nos lecteurs. L'ancien vice-président de l'Ordre, Ivo Uyttendaele penche pour la même explication.
Rétroactes. L'arrêt, daté de fin mars, semblait renforcer le secret professionnel (article 458bis du Code pénal). La Cour y déclarait en effet que le médecin pouvait se soustraire au secret - en l’occurrence informer le procureur du Roi - si le patient était victime d’infraction grave et que le médecin était également en contact avec l'auteur des faits. Mais pour l’Ordre, qui a publié un avis à ce sujet, mettre cette condition supplémentaire, c’était aller un pont trop loin.
Willem Ceuppens estime que l’Ordre devrait d'abord se demander si une erreur ne s'est pas glissée dans l’arrêt de la Cour, car ce texte, tel qu'il est formulé, « est en effet dépourvu de toute logique morale ». La question, selon notre lecteur, est de savoir comment cela a été traduit. Un passage de l'arrêt se lirait comme suit : " le médecin peut se délier du secret professionnel - et donc informer la justice - si le patient a été victime d'un crime et que le médecin était également en contact avec l'auteur ". « La Cour n'a-t-elle pas simplement voulu dire, au lieu de ‘et le médecin était aussi en contact avec l'auteur’, ‘même si le médecin était aussi en contact avec l'auteur’ ? ".
Il ne s'agirait dès lors pas d'un durcissement des conditions auxquelles un médecin peut se délier du secret, mais d'une clarification, conclut-il. Il pense à la traduction de la conjonction latine "et", qui n'est pas seulement traduisible par "et", mais qui, au début d'une phrase (partielle), peut également prendre le sens de "même", "aussi comme"...
L'ancien vice-président de l'Ordre, Ivo Uyttendaele, pense que Willem Ceuppens a vu juste. "Même lorsque le médecin déclarant a eu un entretien avec l'auteur des faits, ce dernier ne peut pas invoquer l'obligation de confidentialité du médecin car, selon la Cassation, l'entretien avec l'auteur est également une exception au secret professionnel", estime le Dr Uyttendaele.
Interrogé par la rédaction début janvier, le Dr Boxho, vice-président francophone du Conseil national, avait déclaré espérer que la Cour de Cassation ferait marche arrière.
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