On nous annonce de longue date un outil permettant de sélectionner l’examen d’imagerie le plus approprié sur la base des données médicales du patient, mais l’idée peine manifestement à décoller. Il semble par ailleurs que la majorité des prescriptions d’imagerie émanent des médecins de famille (voir tableau)… mais comme ils sont aussi les plus nombreux, il serait un peu malhonnête de leur imputer la responsabilité d’une augmentation de volume.
Dépassements budgétaires répétés aidant, les radiologues aussi sont souvent présentés à tort comme de mauvais élèves. Ils sont donc clairement demandeurs de logiciels susceptibles d’abaisser la proportion de prescriptions d’imagerie inadaptées – un outil qu’on nous a déjà promis à plusieurs reprises (et notamment encore au début de cette année), mais qu’on attend toujours. Pourquoi? «Ce ne sera pas encore pour demain, car le logiciel coûte cher», explique le Dr Charles Van de Velde de la Belgian Society of Radiology (BSR). «Le dossier est actuellement entre les mains de l’Inami. Il concerne un outil déjà validé à l’échelon européen, mais qui doit à présent être implémenté dans la pratique. Les entreprises privées réclament aussi des frais de gestion conséquents… et même si je pense que les généralistes ne sont pas en soi opposés à ce logiciel, si on leur dit que l’abonnement annuel coûte environ 5.000 euros, cela change évidemment la donne.»
Une question d’ego?
S’agissant du volume de prescription et du recours à l’imagerie médicale, les radiologues peuvent certes les rectifier jusqu’à un certain point voire éventuellement substituer, mais pas de façon fondamentale. En plus, si les généralistes sont généralement ouverts à leur feedback, les experts soulignent qu’il en va souvent autrement dans les hôpitaux (parce qu’il faut, en clair, rentabiliser l’appareillage ou ménager les egos). «Lorsqu’un politicien fait une chute à vélo un dimanche et exige un CT-scan du crâne, qui le lui refusera?», réagit un observateur.
Au-delà des hôpitaux, des médecins qui y travaillent et des généralistes, le volume des examens d’imagerie est aussi influencé par les patients eux-mêmes, qui se montrent de plus en plus assertifs et n’hésitent pas, parfois, à insister pour obtenir une prescription.
Nivellement
La Belgique va se doter de 18 nouveaux appareils d’IRM, comme le prévoit un accord de protocole signé à la fin de l’année dernière au sein de la Conférence Interministérielle Santé Publique. Cette dernière a également décidé de la ventilation des appareils entre les régions, qui devront à leur tour les répartir entre les hôpitaux par le biais d’arrêtés d’exécution, ce qui nous réserve certainement encore quelques marchandages. Pour l’heure, le dossier est toutefois en suspens faute de gouvernements régionaux.
L’achat des appareils incombera aux hôpitaux, leur financement aux entités fédérées et leurs frais de fonctionnement (environ 315.000 euros par appareil et par an), à l’État fédéral.
Les hôpitaux sont évidemment tous demandeurs. Les établissements importants, qui disposent déjà d’un ou deux appareils, vont-ils s’en voir allouer une de plus, ou donnera-t-on la priorité aux petites structures et à la proximité des soins ? En tout état de cause, tout devra se faire dans les limites d’un budget fermé et l’accord de protocole prévoit que les services les plus importants devront se serrer la ceinture au profit des plus petits. On évoluerait donc vers un certain nivellement, ce qui ne semble pas évident pour tout le monde…
Prescriptions d’imagerie médicale (radiodiagnostic, imagerie de la colonne, CT)
Spécialité |
N prestations |
% prestations |
N dépenses |
% dépenses |
Médecine générale |
206.983,00 |
49% |
18.478.397,05 |
49%
|
Chirurgie orthopédique |
36.759,00 |
9% |
3.258.459,64 |
9%
|
Neurochirurgie |
26.788,00 |
6% |
2.369.643,62 |
6%
|
Médecine physique |
24.471,00 |
6% |
2.183.742,71 |
6%
|
Spécialistes en formation |
24.003,00 |
6% |
2.164.202,41 |
6%
|
Médecine aiguë et d’urgence |
19.935,00 |
5% |
1.791.655,78 |
5%
|
Anesthésie-réanimation |
11.930,00 |
3% |
1.075.910,25 |
3%
|
Rhumatologie |
10.770,00 |
3% |
936.476,13 |
2%
|
Chirurgie |
10.584,00 |
3% |
949.452,00 |
3%
|
Neurologie |
10.266,00 |
2% |
925.543,01 |
2%
|
MGFP |
7.469,00 |
2% |
668.484,92 |
2%
|
Médecine interne |
6.615,00 |
2% |
594.553,25 |
2%
|
Gériatrie |
4.756,00 |
1% |
433.065,08 |
1%
|
Autres spécialités |
21.763,00 |
5% |
1.944.368,34 |
5%
|
Total |
423.092,00 |
100% |
37.773.954,19 |
100% |
Derniers commentaires
Christian DELCOUR
26 juillet 2019voir le site:
belgiqueenbonnesante.be ou healthybelgium.be ou gezondbelgie.be
pour tenter de comprendre les variations de pratiques médicales
Cécile VIRGO
25 juillet 2019Il y a aussi un autre biais qui fait que les généralistes sont sur-représentés: le patient qui revient de chez le spécialiste en disant que « le médecin traitant fera la demande », celui qui va voir le kiné ou l’ostéopathe qui lui dit qu’il faut absolument qu’il fasse, au choix, un scanner/écho/IRM et celui qui a perdu le papier que le spécialiste lui avait fait!