Amnesty lance une pétition pour dépénaliser entièrement l'avortement en Belgique

La section belge francophone d'Amnesty International a lancé jeudi une pétition en faveur d'une dépénalisation totale de l'avortement en Belgique. Alors que les députés tiennent leur première séance à la Chambre depuis les élections du 9 juin, l'organisation de défense des droits humains exhorte les nouveaux parlementaires à changer la loi pour reconnaître "explicitement" l'interruption volontaire de grossesse comme un soin de santé.

La pétition entend notamment rappeler "le large soutien de la société civile" à ce droit, alors que le parlement précédent a échoué à voter une proposition de loi du PS, co-signée par sept partis. Le CD&V, la N-VA et le Vlaams Belang avaient fait bloc pour empêcher que le texte soit approuvé.

Depuis 1810, le code Napoléon criminalise l'avortement, institué ensuite par le code pénal belge en 1867 comme une infraction à l'encontre de l'ordre des familles et de la moralité publique. Il faudra attendre 1990 pour décriminaliser partiellement l'avortement en Belgique. La loi impose alors notamment qu'un médecin atteste de la situation de "détresse" dans laquelle se trouve la femme. Des sanctions pénales sont prévues pour les patientes et les praticiens qui ne respectent pas les conditions. La loi de 2018 est plus favorable, en supprimant entre autres cet état de détresse. Elle conserve toutefois les sanctions pénales en cas de non-respect des conditions.

Or, "la criminalisation ne fait pas disparaître les recours à l'avortement 'hors cadre'. Elle les rend juste plus dangereux", souligne Julie Capoulade, chargée de campagnes de la section belge francophone d'Amnesty International. Près de 400 femmes se sont rendues aux Pays-Bas en 2021 pour avorter, où le délai légal est fixé à 22 semaines d'aménorrhée , pointe Amnesty.

Actuellement, la possibilité d'avorter est limitée à 12 semaines post-conception en Belgique. La loi impose aussi une période de réflexion obligatoire de six jours entre le premier rendez-vous médical et l'avortement, ainsi qu'une obligation de renseigner la personne qui souhaite avorter sur les possibilités d'accueil de l'enfant à naître. Une clause de conscience est par ailleurs reconnue aux soignants.

Ces conditions sont discriminantes, souligne Amnesty. Se rendre dans un autre pays pour voyager a notamment un coût, que ne peuvent pas toujours se permettre les femmes issues de milieux précaires. De plus, la loi ne reconnaît pas le droit d'avorter des hommes transgenres, des personnes intersexes et non binaires, poursuit l'organisme. "Parler des 'personnes enceintes' dans la loi permettrait de lutter contre ces discriminations croisées dans l'accès à un avortement sécurisé", préconise-t-il.

Pour Amnesty, les nouveaux élus doivent aussi remédier à un autre obstacle: la pénurie de praticiens du soin à l'avortement. Ce dernier est en effet peu enseigné dans les facultés de médecine.

"La capacité des individus à exercer leur autonomie reproductive est une question de justice, d'égalité et de respect des droits fondamentaux de chaque individu. Malgré toutes les idées reçues et les opinions contraires qui peuvent circuler, il semble que la majorité de la population soit favorable à faire avancer le droit à l'avortement en Belgique, mais ce soutien demeure entouré de silence. C'est pour cette raison que nous appelons le public à se faire entendre, notamment en signant notre pétition", conclut l'association.

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