COVID long : un parcours du combattant pour les patients et les médecins

La prise en charge de cette affection catastrophique pour le patient commence par une errance diagnostique. La description en est difficile tant la symptomatologie est variable. Il faut pourtant parvenir à se faire une opinion sur la base de la clinique pour pouvoir faire bénéficier le patient des possibilités offertes par l’INAMI dans le cadre d’un trajet de soins.
Il apparaît sur les réseaux sociaux que le COVID long est source de désarroi pour les médecins généralistes. « Rien d’étonnant à cela », rétorque le Dr Marc Jamoulle, médecin de famille (Charleroi), qui en a fait une de ses préoccupations principales, bien qu’il soit à la retraite. « Il est même important de reconnaître avant tout qu’on n’y connaît rien et qu’on n’y comprend rien », ajoute-t-il.

La complexité d’un diagnostic clinique incertain
La première difficulté vient du caractère véritablement protéiforme de la symptomatologie. Et les médecins, formés à reconnaître des profils sémiologiques plus ou moins bien définis, y perdent leur latin. Comme ils ne peuvent pas ranger le profil symptomatique des patients dans une case des classifications existantes, ils ont tendance à nier l’affection du patient ou à l’attribuer à un état psychologique défaillant. « Or c’est précisément ce flou qui doit nous alerter », explique Marc Jamoulle.

Quand la médecine n’a pas toutes les réponses
Les recherches actuelles ont permis de repérer une atteinte endothéliale vasculaire véritablement ubiquitaire, ce qui explique les manifestations multiples : cardiaques, respiratoires, nerveuses, musculaires, digestives, cognitives, etc. L’exemple typique au niveau cognitif est celui d’un intellectuel qui ne comprend plus les notions qu’il utilisait auparavant tous les jours. Ainsi, un architecte ne peut plus lire un plan, un informaticien ne peut plus programmer. La mémoire de travail ou mémoire épisodique est très atteinte et la personne n’enregistre plus rien. Parfois même, elle oublie le début de la phrase qu’elle vient d’entamer.

Déclarer le COVID long pour un accès facilité aux soins
La première démarche consiste à déclarer le COVID long du patient à l’aide du pseudo-code 401450. Il entre alors dans un trajet de soins qui lui permet d’obtenir le remboursement sans ticket modérateur d’une série de prestations.Il pourra ainsi bénéficier d’un examen neuropsychologique de deux heures pour l’évaluation de ses fonctions cognitives et de 10 séances de revalidation neuropsychologique. Une série de 60 séances d’une demi-heure de kinésithérapie sera également remboursée en totalité. Mais il est malaisé de trouver un kinésithérapeute compétent en la matière, qui ne doit surtout pas épuiser le patient par des exercices intempestifs. Un(e) diététicien(ne) pourra aussi être consulté(e) pour un bilan et des séances individuelles. ( Voir aussi sur le site de l'inami )

Un traitement symptomatique sans base EBM
Sur le plan pharmacologique, le traitement sera symptomatique. En fonction des symptômes, différents traitements peuvent être mis en place : anticoagulant plaquettaire, nootrope (piracetam), antalgie par naltrexone à très faible dose, antihistaminique, SSRI, méthylphénidate, etc. Il faudra veiller scrupuleusement à faire des choix en partenariat avec le patient et être bien conscient qu’il n’y a pas d’EBM en la matière.

L'importance de soutenir les patients dans leur quotidien
« Il est important de conseiller aux patients d'éviter le surmenage physique ou mental », ajoute le Dr Jamoulle, « car cela peut aggraver les symptômes (phénomène de "crash post-effort") ». Le rôle du médecin généraliste est essentiel pour coordonner le suivi des patients avec d'autres spécialistes tels que les pneumologues, cardiologues, neurologues, kinés, neuropsychologues et psychologues.

Un enjeu de santé publique à aborder collectivement
Une association de patients COVID long permet aux patients d’échanger avec des pairs (https://longcovidbelgium.be/) et renseigne les médecins. Deux associations dédiées aux patients cérébro-lésés apportent leur aide sur le plan administratif et social aux patients victimes de COVID long francophones : Le Ressort en Wallonie et La Braise à Bruxelles.

Vers une reconnaissance et une meilleure prise en charge du COVID long
Une approche systémique familiale doit être pratiquée, étant donné la perte de rôle du patient (perte de la faculté de s’occuper de la famille, deuil du patient devant sa vie perdue, apprentissage du handicap).

Au Congrès de Médecine générale qui se tiendra à Namur les 15 et 16 novembre, une session sera consacrée le samedi après-midi aux conséquences à long terme du COVID.

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