En Wallonie, l'opposition fulmine; les pouvoirs dérogatoires passent

Les députés wallons se sont penchés, ce mercredi après-midi, en séance plénière de l'assemblée régionale, sur deux décrets accordant au gouvernement des moyens dérogatoires en cas de crise importante. Des "pouvoirs spéciaux inacceptables", a protesté, en vain, l'opposition cdH et PTB. Au terme de débats mouvementés, les deux textes ont été adoptés.

Le premier concerne la promotion de la santé et la prévention, notamment en matière de maladies infectieuses. Le second détermine un cadre juridique pour les aides directes octroyées aux victimes des inondations éprouvant des difficultés à payer leurs factures d'énergie. 

Les deux textes, en instillant ce qui s'apparente à des pouvoirs spéciaux dans des mesures générales, constituent "un danger pour la démocratie",  ont dénoncé en choeur le cdH et le PTB.

"Le texte sur la promotion de la santé n'est pas un décret anodin; c'est l'équivalent régional de la loi pandémie et c'est pour cette raison qu'il doit faire l'objet d'un débat digne de ce nom", a ainsi souligné la députée cdH Mathilde Vandorpe en évoquant les pouvoirs "exorbitants" que l'exécutif décide de s'octroyer. "En normalisant l'état d'urgence, on normalise une gestion autoritaire de la crise, avec des exécutifs qui décideront de tout

"Cette loi pandémie régionale est attentatoire aux libertés des citoyens en donnant les pleins pouvoirs au gouvernement pour prendre, sans aucun débat, des mesures sous prétexte de lutter contre une maladie contagieuse", a renchéri Germain Mugemangango (PTB).

"Les modifications proposées dans ce projet de décret n'apportent aucun changement considérable en matière de suivi des maladies infectieuses et d'interventions à domicile. Au contraire, elles assurent un meilleur encadrement de pratiques déjà à l'œuvre", a de son côté défendu la ministre wallonne de la Santé, Christie Morreale.

Ce texte réaffirme par contre les droits des patients en leur reconnaissant formellement le droit de refuser un traitement, à condition que d'autres mesures permettent d'assurer l'absence de contagion. Cette mesure n'existait pas auparavant; le décret la prévoit explicitement. Il n'est donc pas question d'imposer un quelconque traitement, ni la vaccination, mais, bien au contraire de réaffirmer le droit des patients, a-t-elle ajouté .

En outre, "les balises sont nombreuses: avant d'enclencher quoi que ce soit, il faut que l'état d'urgence soit déclaré par le Roi, le Parlement doit donner son aval dans les 15 jours et les mesures adoptées sont temporaires: un mois. Il s'agit donc bien d'un texte activable dans une situation exceptionnelle", a encore assuré la ministre.

Quant au second décret, "s'il est généreux dans ses intentions en apportant un cadre juridique pour l'aide directe aux sinistrés de juillet qui peinent à payer leurs factures énergétiques, il comporte lui aussi des dispositions par lesquelles le gouvernement s'arroge le droit de faire ce qu'il veut", a pointé François Desquesnes (cdH). "C'est une confiscation de la démocratie qui ne se justifie aucunement, le parlement ayant prouvé qu'il pouvait travailler vite et faire face à toutes les situations", a-t-il estimé.

"Ce texte, qui arrive 7 mois après les inondations alors que le gouvernement dit vouloir être en mesure d'agir rapidement, est un coup de canif supplémentaire à la démocratie parlementaire. Notre objectif, c'est aussi de susciter la réflexion parmi les députés de la majorité", a enfin déclaré le chef de file des humanistes.

Dans les rangs de l'opposition toujours, le PTB n'a pas dit autre chose. "Sous couvert d'aider les victimes, le gouvernement va pouvoir faire passer des mesures impopulaires. C'est inacceptable", a ainsi abondé Julien Liradelfo. "Vous prenez le parlement en otage: nous voulons soutenir cette aide mais pas le recul démocratique que le texte implique", a-t-il regretté.

"Il ne s'agit aucunement de modifier la législation sur l'énergie ou d'instaurer par la bande des mécanismes qui seraient difficilement assumables devant les citoyens. Ce décret permet clairement d'agir plus vite et positivement en faveur de la population", leur a rétorqué le ministre régional de l'Energie, Philippe Henry.

Au terme de débats longs et houleux, marqué par le dépôt d'une multitude d'amendements, les deux décrets ont finalement été adoptés par la majorité PS-MR-Ecolo.

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