La couverture vaccinale contre la grippe a stagné parmi les personnes à risque entre 2013 et 2023, constatent les Mutualités libres dans une étude publiée mardi. En dix ans, les seniors, femmes enceintes et malades chroniques sont restés bien loin de la couverture de 75% recommandée par l'Organisme mondial de la santé.
Un senior sur deux était vacciné contre la grippe en 2023. Dix ans plus tôt, cette proportion était en tous points pareille (50,7%), ressort-il des chiffres de la mutualité, qui a sondé 1,6 million d'affiliés adultes.
Les personnes souffrant d'une affection chronique sont même moins protégées (43,4%) qu'il y a dix ans (46,9%). À l'inverse, la proportion de femmes enceintes vaccinées contre la grippe a, elle, légèrement augmenté, mais reste très faible (14,8% en 2022 contre 10,4% en 2013).
La pandémie de coronavirus a provoqué un sursaut et, en 2020, le taux de vaccination s'est hissé à 57,5% chez les 65 ans ou plus, 52,7% chez les malades chroniques et 26% chez les femmes enceintes. Toutefois, dès l'année suivante, la couverture s'est de nouveau détricotée.
Ainsi, seules 63,3% des personnes ayant reçu un vaccin antigrippal en 2020 ont répété l'opération chacune des trois années suivantes. Les moins fidèles au vaccin sont les individus sans dossier médical global (DMG, géré par le médecin et qui rassemble toutes les données médicales du patient) et, surtout, la tranche des 18-45 ans (moins de 22%). Passé le pic de la pandémie, les campagnes de vaccination couplée - où le rappel du sérum anti-Covid et le vaccin contre la grippe sont administrés le même jour - n'ont donc, semble-t-il, pas permis d'ancrer dans les habitudes la protection contre la grippe saisonnière.
Les Mutualités libres remarquent par ailleurs que, dans les trois groupes à risque, le taux de vaccination contre la grippe est plus faible à Bruxelles qu'en Wallonie ou en Flandre. L'explication est multifactorielle. Les Bruxellois et Bruxelloises sont par exemple moins nombreux à disposer d'un DMG, explique la porte-parole des Mutualités libres, Marianne Hiernaux. La capitale compte aussi plus de seniors isolés que les autres Régions, et jusqu'à trois fois plus de bénéficiaires âgés d'une intervention majorée ou d'un revenu d'intégration (comme le CPAS). En outre, l'étude n'englobe pas les personnes qui se font soigner dans les maisons médicales, où un patient n'a pas de médecin attitré.
De manière générale, plusieurs freins à la vaccination coexistent. Une personne peut ainsi ignorer qu'elle appartient à un groupe à risque, elle peut se montrer méfiante par rapport au système de soins ou encore avoir développé des résistances au vu d'expériences passées. Le coût du vaccin et de la prestation de soin peut également constituer un obstacle, comme certaines contraintes logistiques (difficulté à se déplacer, etc.).
Pour augmenter le taux de vaccination, "tous les acteurs de la santé" doivent fournir "un effort important". Outre les médecins, les infirmières et certaines sages-femmes peuvent aussi administrer un vaccin contre la grippe (sur prescription d'un docteur). Depuis le mois d'octobre, la patientèle peut également se tourner vers son pharmacien.
"Le médecin est une figure importante de référence pour le patient, encore plus pour les personnes âgées et malades chroniques", relève Mme Hiernaux. "Nos chiffres révèlent que, en complémentarité avec le médecin généraliste, le pharmacien prend aussi un rôle actif dans la vaccination, avec 73% de vaccins prescrits (contre 26% par les médecins, NDLR) et 20% de vaccins administrés pour les groupes à risque."
En 2020, cette proportion était quasiment inversée: 20% des vaccins pour les publics vulnérables étaient prescrits par les pharmaciens et 72% par des médecins généralistes.
En Belgique, la grippe touche en moyenne 500.000 personnes chaque année, dont 2% à 3% développent des complications (comme la pneumonie) nécessitant une hospitalisation, d'après les chiffres des Mutualités libres.