L'équipe que dirigera l'Allemande Ursula von der Leyen pour son second mandat à la présidence de la Commission européenne a reçu la confiance des eurodéputés, mercredi à Strasbourg.
Elle a bénéficié du soutien de 370 élus, contre 282 opposants et 36 abstentions. Le PPE (chrétiens démocrates, droite) l'a approuvée à une large majorité, de même que les libéraux-centristes de Renew. Les socialistes et sociaux-démocrates du S&D ont également apporté un large soutien, même si les délégations française, allemande et belge se sont soit abstenues, soit ont voté contre. Ces trois groupes parlementaires sont a ppelés à constituer la charpente de la "majorité von der Leyen II" dans l'hémicycle.
Une courte majorité de Verts/ALE ont également pressé le bouton vert, de même qu'une trentaine d'élus ECR (droite souverainiste et extrême droite).
Même si elle dépasse de dix voix la moitié du nombre de sièges, la nouvelle équipe devient celle qui a reçu le moins de votes en sa faveur depuis 1995, année où le Parlement a obtenu le pouvoir de voter formellement sur la nomination de la nouvelle Commission. Avec 53,77% des voix, elle est loin des 61,63% décrochés il y a cinq ans par "Von der Leyen I".
Les raisons principales sont à chercher dans le résultat des élections, qui ont affaibli la tripartite sortante au profit d'une poussée de l'extrême droite, ainsi que dans le choix d'Ursula von der Leyen d'octroyer un titre de vice-président exécutif au candidat commissaire italien Raffaele Fitto. Ce dernier est issu des rangs du parti post-fasciste de Giorgia Meloni. Ses troupes, membres d'ECR, ont soutenu le nouveau casting, mais ce soutien controversé a privé la tripartite traditionnelle de nombre de voix.
Pas même un tiers des eurodéputés belges ont voté pour la nouvelle équipe. Les élus PS (Elio Di Rupo, Estelle Ceulemans), Ecolo (Saskia Bricmont) et PTB (Marc Botenga) l'ont rejetée, tandis que ceux du MR (Sophie Wilmès, Olivier Chastel, Benoit Cassart) et des Engagés (Yvan Verougstraete) s'abstenaient.
Côté néerlandophone, les soutiens sont venus de la N-VA (Johan Van Overtveldt, Assita Kanko, Kris Van Dijck), du CD&V (Wouter Beke, Liesbet Sommen) et de l'Open Vld (Hilde Vautmans). Vooruit (Bruno Tobback, Kathleen Van Brempt) s'est abstenu, tandis que Groen (Sara Matthieu), PVDA (Rudi Kennes) et Vlaams Belang (Gerolf Annemans, Barbara Bonte, Tom Vandendriessche) votaient contre. L'élu germanophone du CSP, Pascal Arimont, a voté pour.
En matinée, la tripartite PPE-S&D-Renew avait montré sa fragilité: les socialistes et les libéraux-centristes ont enjoint aux chrétiens-démocrates de ne pas mener "un double jeu" en recourant, au cas par cas, au soutien de l'extrême droite, comme ça a pu être le cas ces dernières semaines.
Au final, plus de 40 des 136 élus socialistes ont décidé de ne pas soutenir la Commission. Dans les rangs PPE, les défections sont venues des Espagnols du Parti populaire. Ces derniers n'ont pas digéré la confirmation de la ministre espagnole de l'Environnement, la socialiste Teresa Ribera, à un poste de vice-présidente exécutive de la Commission, elle à qui ils reprochent un manque d'anticipation pour les inondations meurtrières de Valence.
Le poste de l'Espagnole avait fait l'objet de vétos croisés, lors des auditions, avec celui de Raffaele Fitto. À l'issue du vote, ce dernier a appelé à l'unité. Parmi ceux qui ont soutenu la Commission, figure d'ailleurs le centre-gauche italien.
Si, comme attendu, le nouvel exécutif est confirmé dans les jours qui viennent au Conseil européen, il pourra entrer en fonction le 1er décembre. Avec 14 membres PPE ou proches, l'équipe Von der Leyen II est dominée par les chrétiens-démocrates pro-européens.
Dans le contexte d'une rivalité économique croissante avec les États-Unis et la Chine, de tensions avec la Russie et de l'arrivée imminente de Donald Trump à la présidence des États-Unis, la Commission dit vouloir travailler au renforcement de la compétitivité de l'économie européenne et à la construction d'une union européenne de la défense, a déclaré Mme Von der Leyen avant le vote.
Dans la nouvelle équipe, la Belge Hadja Lahbib (MR) sera chargée de la préparation et de la gestion des crises ainsi que de l'égalité. "C'est un grand honneur de pouvoir contribuer à l'avenir de l'Europe pour les cinq années à venir. Une grande responsabilité aussi, à un moment de notre histoire où les menaces sont multiples et où les crises mettent en danger les droits et libertés durement acquis", a-t-elle déclaré à l'issue du vote.
"Ma mission sera de protéger les Européens et de renforcer leurs droits. D'incarner l'Union dans ses valeurs fondatrices en lui donnant un visage juste et humain. De répondre aux attentes des citoyens par la solidarité et l'inclusion, à leurs inquiétudes par une stratégie de préparation et de prévention des crises et menaces", poursuit-elle.
L'ancienne journaliste et ministre des Affaires étrangères assure qu'elle mettra "toute (son) énergie pour faire de l'égalité une réalité, pour augmenter notre résilience et pour renforcer la solidarité en Europe et ailleurs."
La Belge a hérité, au terme d'auditions qui ont mis à mal le commissaire hongrois Oliver Varhelyi, de certaines des compétences de ce dernier: l'autorité chargée de gérer les crises sanitaires (Hera) ainsi que les droits de santé sexuelle et reproductive. Ursula von der Leyen a cité la Belge à deux reprises dans sa présentation. "Elle a brisé tant de plafonds de verre", selon l'Allemande.