Les institutions académiques belges pourraient jouer un rôle plus important dans le développement des médicaments de thérapie avancée (ATMP), selon une analyse du Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE). Ces traitements, basés sur des cellules, des gènes ou des tissus, sont principalement utilisés contre certaines formes de cancer ou des maladies génétiques, mais leur accès reste limité en raison de leur coût élevé et de la complexité de leur développement.
Les ATMP actuellement commercialisés par l’industrie sont peu nombreux et souvent vendus à des prix très élevés, pouvant atteindre plusieurs millions d’euros par traitement. En Belgique, moins de la moitié des ATMP autorisés dans l’Union européenne sont effectivement disponibles, et leur remboursement repose sur des accords confidentiels entre l’INAMI et les firmes pharmaceutiques.
Selon le KCE, certaines thérapies, jugées peu rentables par l’industrie, ne sont pas développées, tandis que d’autres sont retirées du marché malgré leur autorisation, faute de viabilité économique. Ce fut notamment le cas pour sept des 27 ATMP ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché dans l’UE.
Le rôle croissant des institutions académiques
Face à ces enjeux, le KCE a examiné comment les universités pourraient contribuer davantage à la recherche et au développement de ces médicaments. Certaines initiatives étrangères, comme aux Pays-Bas ou en Espagne, montrent que des équipes académiques peuvent mener des projets de mise sur le marché. Récemment, une fondation caritative italienne a également repris la commercialisation d’un ATMP abandonné par l’industrie.
En Belgique, les études cliniques portant sur les ATMP sont nombreuses, mais celles initiées par des institutions académiques restent rares. Le financement provient principalement de sources publiques européennes ou des entités fédérées, ainsi que d’organisations à but non lucratif telles que la Fondation contre le Cancer.
Des obstacles réglementaires et financiers
Le KCE identifie plusieurs obstacles au développement académique des ATMP. En premier lieu, l’expertise nécessaire est fragmentée, et les mécanismes de financement sont souvent dispersés et limités dans le temps. Les subventions publiques, par exemple, visent davantage à stimuler l’économie et l’emploi qu’à répondre aux besoins de santé publique.
Un autre frein concerne l’exemption hospitalière, qui permet aux hôpitaux de mettre à disposition des patients des ATMP sans autorisation de mise sur le marché européenne. Depuis son introduction en 2017, une seule exemption a été accordée en Belgique, et seulement à une spin-off commerciale. Les universités et l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) divergent sur l’interprétation des conditions d’éligibilité, rendant cette voie difficilement accessible.
Des pistes pour améliorer la situation
Pour renforcer le rôle du monde académique, le KCE propose plusieurs recommandations. Il plaide notamment pour un financement plus stable et moins morcelé, accordé sur une période suffisamment longue et assorti de priorités claires entre les différents niveaux de pouvoir. Dans le cadre de partenariats avec l’industrie, des garanties devraient être prévues afin que les traitements issus de la recherche publique restent financièrement accessibles.
Le KCE appelle également à une meilleure harmonisation des règles encadrant l’exemption hospitalière au niveau européen, et à une clarification des conditions d’application en Belgique. Il recommande que l’AFMPS publie une interprétation précise de ces conditions et encourage les universités à bénéficier de concertations préalables avant le dépôt d’une demande.
Enfin, au-delà des aspects financiers et réglementaires, le rapport souligne le besoin d’une expertise scientifique plus accessible et d’une collaboration accrue entre les autorités et le monde académique pour assurer un développement plus efficace des thérapies avancées en Belgique.
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