«Au cours de toutes les vagues de la pandémie, on a compté sur les généralistes pour trier, contribuer à réguler l’afflux vers les hôpitaux, accompagner les patients à domicile et répondre à leurs questions lorsqu’ils avaient du mal à joindre les spécialistes… mais au bout du compte, rien n’a changé: c’est le spécialiste qui reste à la première place», résume Domus Medica avec une déception non dissimulée en réaction aux propositions du GBS pour une refonte de la première ligne.
Manifestement, les médecins de famille flamands sont piqués au vif. «Après avoir laissé les généralistes passer plus d’un an au front, le Groupement des unions professionnelles belges des médecins spécialistes (GBS) se sent appelé à les remettre à leur place… et à son sens, cette place, ce n’est clairement pas celle d’un gatekeeper.»
La crise avait pourtant bien rapproché généralistes, spécialistes et autres prestataires de soins, animés qu’ils étaient du souci commun de l’intérêt des patients covid et autres durant cette période difficile. Entre partage des tâches et soutien mutuel, des accords et collaborations spontanés s’étaient développés et les différents acteurs avaient appris à mieux se connaître et se respecter. Une base prometteuse pour un avenir meilleur? À la lecture du manifeste du GBS, Domus Medica est tombé de haut.
Le DMG, une affaire de spécialistes?
«Le GBS appelle à réformer la première ligne en profondeur et à l’ouvrir largement aux spécialistes dans un souci d’efficience et de développement d’une offre de proximité, mais ce n’est pas tout», fulmine l’association des généralistes flamands. «D’après lui, le spécialiste est également l’acteur ad hoc pour l’ouverture du dossier médical global. La prochaine fois que vous allez voir l’orthopédiste pour votre cheville, pensez donc à mentionner que vous avez mal en urinant, il se chargera bien de vous traiter ou de vous adresser à l’urologue le plus proche! Manifestement, l’idée que le DMG est un aperçu global du patient du berceau au tombeau (sur le plan aussi bien médical que social ou psychologique) et un outil qui rend possibles un bon suivi et une bonne prévention n’a pas encore fait son chemin.»
Soins spécialisés: meilleurs et moins chers?
Le GBS tire aussi à boulets rouges sur l’échelonnement, l’idée d’un généraliste «gatekeeper» étant pour lui inacceptable, coûteuse et un obstacle à l’accessibilité des soins, puisque certains médecins de famille n’acceptent plus de nouveaux patients. «Laissons donc les spécialistes extrahospitaliers – non conventionnés – s’en occuper», ironise Domus. «C’est peut-être un raisonnement simpliste tenu par des médecins moins compétents, mais ne faudrait-il pas plutôt en conclure que nous avons trop de spécialistes et pas assez de généralistes?»
Pour Domus Medica, c’est toutefois dans sa conclusion que le GBS atteint le comble du cynisme: «Plus on est compétent, moins on coûte à l’État. Il faut déjà une certaine audace pour affirmer qu’un spécialiste serait plus compétent qu’un généraliste… mais prétendre qu’il est aussi moins cher, cela relève du délire.»
Un nouveau concept de soins de santé
Même si elle ne cache pas sa déception, Domus Medica souligne que, sur le terrain, les spécialistes et les hôpitaux sont nombreux à reconnaître et à apprécier la vision globale et le rôle de filtre du médecin de famille.
Le syndicat des généralistes flamands plaide en faveur d’une nouvelle vision des soins qui exploiterait de manière optimale les compétences de chacun, où chaque citoyen aurait un généraliste attitré en charge de son DMG et où la collaboration s’organiserait suivant un principe de subsidiarité – le tout au plus près des gens, mais avec un partage des tâches clairs et un accès aux soins filtré par le médecin de famille.
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