En 2017, l'Ordre des médecins avait reçu 64 plaintes concernant des certificats de complaisance (*). L’an dernier, ce total a presque été multiplié par deux (115 plaintes). Parmi toutes les plaintes qui arrivent à l’Ordre, les certificats de complaisance occupent la première place.
En Belgique, dès le premier jour d’absence, un travailleur doit obligatoirement rentrer un certificat d'incapacité de travail. Le document sert à justifier cette absence. Encore faut-il que celle-ci soit fondée médicalement…
Employeurs et tribunaux
Les employeurs constituent le plus grand groupe de plaignants à s’être manifestés auprès de l’Ordre pour des problèmes de certificats d’incapacité abusifs (de complaisance). Logique, puisqu’ils souffrent tant sur le plan financier qu’organisationnel des absences de leur personnel. Il y a deux ans, le SNI (Syndicat neutre pour indépendants et patrons de PME) avait d’ailleurs ouvertement soutenu la création d’un point de contact à l’Inami pour dénoncer les médecins délivrant abusivement des certificats d’arrêt maladie.
Par ailleurs, de nombreux tribunaux ont également introduit des plaintes l'an passé. Peut-être les élections y sont-elles pour quelque chose : les gens se procurent un certificat d’inaptitude pour se soustraire à l’obligation d’être assesseur dans un bureau de vote ou de dépouillement.
Le Pr Michel Deneyer, vice-président de l’Ordre, souligne que la majorité des médecins ne se prêtent pas au jeu des certificats de complaisance. Et si jamais ils y consentent, ce n’est certainement pas pour s’enrichir, mais parce qu’ayant noué de bons contacts avec le patient, ils ne veulent pas compromettre la relation de soins. "Cela ne change rien au fait qu’il faut combattre le phénomène. Un certificat médical doit être conforme à la vérité, objectif et concis. Il ne peut pas contenir ou confirmer des suppositions ou hypothèses, seulement des faits constatés par le médecin. Malheureusement, les certificats mensongers de complaisance restent au premier rang des plaintes qui nous sont adressées. "
Michel Deneyer conseille donc aux médecins de placarder dans leur salle d’attente un texte de l'Ordre, à des fins préventives. L'effet dissuasif de cet avertissement est prouvé.
Le texte prévient les patients qu’:" il est inutile de demander au médecin un certificat non conforme à la vérité. Cette demande sera toujours refusée. Tant la demande de faux certificats que leur délivrance sont punissables par la loi. Art. 196-197-213-214 du Code pénal ».
Rappelons qu’au printemps dernier, le tribunal correctionnel de Bruxelles a condamné à un mois de prison avec sursis un MG de Laeken pour faux certificats.
Une autre façon pratique de garder l’église au milieu du village est de manifester ouvertement au patient tous les doutes qu’on nourrit, en tant que médecin, quant à sa demande et lui de proposer de “dormir dessus”. Le patient peut alors éventuellement revenir le lendemain, s'il continue de penser qu’il a droit à un certificat.
Ne pas abuser de la relation de confiance
Il y a quelques mois, le BVAS, la branche flamande de l’ABSyM, avait appelé le corps médical à ne pas délivrer de certificats à des policiers qui n’étaient pas vraiment malades mais se faisaient massivement porter pâles dans le cadre d’une action de protestation. Un médecin ne peut établir de certificat de complaisance, quand bien même il se sent solidaire des motivations d'un patient.
Quant aux patients, ils sont priés de ne pas abuser de la relation de confiance tissée avec leur médecin pour lui soutirer un certificat de maladie médicalement injustifié.
(*) « certificat de complaisance » n’est pas une expression officielle. Elle s’emploie quand il y a des raisons de penser qu’un médecin délivre un certificat à un patient pour servir ses intérêts et sans qu’il soit démontré que celui-ci est réellement inapte (pour le travail). Il s’agit donc officiellement d’un certificat d’incapacité de travail. Emettre un tel document est en principe interdit. Une "variante" est envisageable en milieu scolaire : « l’attestation dixit ». Le médecin se contente de noter « le patient m’a affirmé que ... » (il n’a pas été en mesure pour raisons de santé d’aller aux cours, de se présenter à un examen ou un stage, par exemple) - d’où l’appellation « dixit ». Il ne fait que relater la version du patient, sans la cautionner. Ces attestations dixit agissent comme un signal.
> Le débat se poursuit sur @MediSphereHebdo et @LeSpecialiste
Un véritable certificat de complaisance mensonger ne peut pas être toléré. Mais où est la vérité ? Les propos du patient sont eux mêmes déjà éminemment subjectifs. Cfr les remarques de l’absym-bvas sur ce sujet @absymtweets
— depuydt caroline (@DepuydtCaroline) 10 janvier 2019