On entend actuellement bien des sources affirmer avec aplomb sur les médias sociaux qu’une bonne partie des réfugiés syriens sont en réalité des profiteurs – comprenez, des «réfugiés économiques», pour utiliser un terme plus politiquement correct. Le Dr Gerlant van Berlaer, pédiatre et urgentiste à l’UZ Brussel qui travaille actuellement au poste de secours de Médecins du Monde sur la place Maximilien, dresse de la réalité un tableau bien différent. Nous aurons l’occasion de vous proposer une interview détaillée dans une prochaine édition de Medi-Sphere.
«Dernièrement encore, j’ai reçu un patient atteint de leucémie», relate Gerlant van Berlaer. «Sa dernière prise de sang (il avait sur lui une photo des résultats) remontait à 2014 – une déficience proprement hallucinante dans la prise en charge d’un patient leucémique! Lorsque son oncologue traitant a fui le pays, il a continué à prendre son traitement sans encadrement, jusqu’à ce que sa pharmacie disparaisse également. Lors de la consultation à Bruxelles, il n’avait plus pris aucun traitement depuis deux semaines. Il souffrait d’ictère et d’un léger ralentissement mental, et avait perdu 17kg au cours des six derniers mois. Nous avons heureusement pu organiser un suivi ambulatoire par l’hôpital Saint-Pierre. Et quel était son plus gros problème, à votre avis? Quand je lui ai posé la question, il a éclaté en sanglots: il avait dû abandonner femme et enfant en Syrie faute de moyens pour assumer le coût du voyage pour trois. Quand sa maladie n’est plus la préoccupation première d’un patient leucémique, il y a de quoi réfléchir…»