Faut-il une séparation nette entre les 1ère, 2e et 3e lignes de soins? Une grande enquête réalisée par Le Spécialiste – journal «frère» de Medi-Sphere – révèle que cette question divise les 893 spécialistes qui ont répondu. On constate un équilibre entre partisans et opposants d’une délimitation nette. Cela vaut pour la séparation aussi bien entre les 1ère et 2e lignes qu’entre les 2e et 3e lignes. Cela dit, ces chiffres cachent d’importantes différences.
A – Séparation entre les 1ère et 2e lignes: les néerlandophones et les jeunes POUR
• Les chiffres
Six spécialistes néerlandophones sur dix sont en faveur de séparations plus claires entre première et deuxième lignes. Quant aux francophones, c’est l’inverse: six sur dix sont contre. On observe légèrement plus de femmes que d’hommes en faveur, mais ici, la différence est nettement plus faible et non significative. Ce qui est vraiment frappant, c’est la rupture de tendance entre les moins de 40 ans (sept sur dix sont pour une séparation) et les plus de 40 ans (juste un peu moins de la moitié est pour et plus ils sont âgés, moins ils sont partisans).
• L’analyse
L’influence de la pléthore de spécialistes, nettement plus importante du côté francophone, peut jouer un rôle. De ce fait, les spécialistes francophones sont moins disposés que leurs collègues néerlandophones à délimiter leur ‘territoire’. Il y a aussi de fortes chances qu’une différence de culture ait une influence. Les francophones se sentent plus vite menacés par des structures qui décident d’en haut. Pourquoi les jeunes sont-ils davantage partisans d’une séparation claire que les plus âgés? La réponse pourrait se trouver précisément dans leur besoin d’avoir davantage de structure dans nos soins de santé complexes. Ils y sont moins familiarisés que les médecins expérimentés.
B – Séparation entre les 2e et 3e lignes: les néerlandophones et les 50-65 ans POUR
• Les chiffres
Plus de six spécialistes néerlandophones sur dix défendent aussi l’idée de séparer 2e et 3e lignes. Les francophones sont à nouveau contre avec une nette majorité, mais un peu moins prononcée qu’à la question précédente (57%). La position des hommes et des femmes n’est pas très différente. Pour ce qui est des tranches d’âge, on constate à nouveau la tendance «plus ils sont âgés, moins ils sont partisans». A une exception qui ressort: les 50-65 ans qui rejoignent pratiquement les moins de 40 ans et qui sont donc principalement pour.
• L’analyse
Une explication pour la différence d’avis en fonction de l’appartenance linguistique réside de nouveau dans la pléthore des spécialistes. Les 50-65 ans ressentent-ils plus de tensions entre les 2e et 3e lignes à ce stade de leur carrière? Pour ces médecins plus âgés, ces deux échelons sont-ils plus rapprochés que lorsqu’ils étaient jeunes?
«Le fait que plus de néerlandophones, et surtout des jeunes néerlandophones, soient partisans d’une séparation entre les 1ère, 2e et 3e lignes vient du lavage de cerveau que les jeunes générations de médecins ont reçu dans les universités flamandes», commente Marc Moens, secrétaire général du GBS. «En Flandre, le monde politique est convaincu qu’il est préférable de délimiter la 1ère ligne de tout le reste de la médecine. Le décret flamand du 3 mars 2004 relatif aux soins de santé de 1ère ligne et à la collaboration entre les prestataires de soins exclut explicitement les spécialistes de la 1ère ligne (article 2, 19°). Pourtant, toutes les lignes doivent se mélanger et une collaboration est nécessaire entre tous les niveaux. Malgré la pléthore de spécialistes nettement plus importante dans la partie francophone du pays, on ne trouve pas de décrets anti-spécialistes en Communauté française et je ne connais pas de profs doctrinaires de médecine générale. La séparation entre les lignes de soins n’a pas de sens. Les médecins experts qui font preuve de déontologie savent parfaitement lorsqu’ils doivent référer des patients vers un médecin ou un service plus spécialisé.»