Avec ce premier article, Valérie Kokozska, Maître de conférence au centre d’Ethique Médicale de l’Université Catholique de Lille, entame une série de 5 articles en écho au cycle d'études consacré aux "Enjeux normatifs de la santé numérique".
La santé numérique va radicalement bouleverser l’univers des soins tel que nous le connaissons. En réalité, c’est moins à un futur-fut-il proche- que nous avons à faire qu’à un présent : la santé numérique est déjà là, le magma en ébullition. Il est possible, bien sûr, devant le tsunami qui s’annonce, de brandir le spectre de la déshumanisation des soins. Mais n’est-ce pas agiter inutilement le fantôme de nos peurs devant un monde à agencer ? Les professionnels, les patients, mais aussi les institutions testent et expérimentent la santé numérique dans des domaines toujours plus nombreux, délivrant sous quelques facettes déjà, la figure d’un nouveau monde. Quels en seront les traits, les contours et les normes ?
Le déploiement de la santé numérique est en tension entre le déferlement d’instruments numériques, d’objets connectés et d’applications qui sont mis quasi journellement sur le marché et une relative inertie si l’on considère le quotidien de l’organisation des soins, des pratiques médicales, des relations entre professionnels et patients. ( Lire aussi Les professionnels de santé croient aux apports des outils numériques, mais les utilisent peu (Baromètre Odoxa)
Aujourd’hui, elle touche surtout la collecte des paramètres et des données de santé, la numérisation et l’agrégation de ces données ainsi que leur traitement algorithmique via intelligence artificielle, et de manière plus visible les modalités d’échange de l’information. En d’autres termes, la santé numérique s’ancre dans le quotidien via les TIC et leur prolongement matériel (apps’, wearables, implantables, etc), facilitant notamment le déploiement de la télémédecine.
Sans être nécessairement portée par des technologies de rupture, la télémédecine transforme la médecine, comme en témoigne l’effervescence qui règne autour de la redéfinition du cadre juridique depuis la nouvelle directive européenne sur les dispositifs médicaux jusqu’à l’étendue de la responsabilité médicale en situation réelle. De ce point de vue, l’irruption de la télémédecine impose , souligne le Pr Lina Williatte, de préciser à partir de la jurisprudence ce que recouvre exactement l’« acte médical » non défini juridiquement, et d’établir sa frontière temporelle. On peut alors opérer une distinction aussi nette que possible entre ce qui ressortit à la e-santé (conseil, information médicale, l’e-commerce en santé) et à la télémédecine proprement dite, soit la téléconsultation, la télé-expertise, la télésurveillance, la téléassistance médicale et la régulation médicale. S’il s’agit de déterminer et de sécuriser le champ des devoirs et des droits du médecin et du patient, la distinction est d’autant plus indispensable que le gouvernement français, soucieux d’administrer la preuve de l’intérêt de la télémédecine pour rencontrer les besoins de santé, a fait rentrer cette dernière dans le droit commun de la sécurité sociale en 2018. L’introduction d’un remboursement des actes télé-médicaux invite ainsi, à rebours, à spécifier l’extension des actes médicaux, et d’une certaine manière à redéfinir les contours de la médecine.
Lire aussi :
> Téléconsultation : quelle relation thérapeutique à distance ? (V.Kokozska)
> La santé numérique à contre-humanité ? ( V.Kokoszka )
Considérations purement spéculatives basées sur un postulat falsifié : il n’existe aucune matière à étudier car l’encodage codé et structuré n’existe pas encore.
— David SIMON (@Freedoc_be) 18 avril 2018
Ce n’est même pas mettre la charrue avant les bœufs mais carrément affirmer que le pain cuit pousse sur le sable !
Le conservatisme médical et la résistance au changments seront les raisons de la "kodakisation" du métier médical. La standardisation et l'algorythmisation changent le métier; le nier est suicidaire. Ne persisterons que ces médecins qui embrasseront cette technologie.
— Coucke (@Coucke5) 20 avril 2018
Conservatisme médical: historique! Médecine devint scientifique bien après la physique, n'a pas encore adopté la culture de documentation, de controle et d'interactions tous azimuts décloisonnant les silos, indispensable à la mise en oeuvre de techniques avancées.
— Jean Creplet (@CrepletJean) 21 avril 2018