La trêve des confiseurs à peine terminée, les réunions de la Médico-Mut ont repris, et la téléconsultation se retrouve à nouveau sur l’autel du sacrifice budgétaire. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette situation est loin de satisfaire les médecins généralistes. Pour eux, sa suppression sous prétexte d’économies est un très mauvais calcul. Réactions du Dr Luc Herry (ABSyM) et du Dr Lawrence Cuvelier (GBO/Kartel).
Pour sa réunion de rentrée, la première de l’année 2025, la Médico-Mut n’a guère été synonyme de réjouissances. L’objectif affiché était de réaliser une économie de 60 millions d’euros, correspondant à l’indexation. Cela a conduit à remettre sur la table la question des téléconsultations, sujet qui avait déjà provoqué une levée de boucliers avant les fêtes.
Il ne serait plus question d’en supprimer totalement le remboursement mais bien de le « ravaler » au niveau du remboursement de l’avis…. Et l’avis, de le faire passer à 2 euros au lieu de quatre.
Deux euros, ce serait même pour les non-BIM. « On oublie que c’est souvent pour un renouvellement de prescription à la demande du patient » rappelle le Dr Luc Herry (ABSyM). Et de décrire les opérations que cette simple démarche suppose : ouvrir le dossier du
patient, faire bien préciser la demande, vérifier si cela se justifie, s’assurer qu’on peut faire la prescription sans revoir le patient et finalement faire la prescription. « Tout cela pour 2 euros ! » s’exclame Luc Herry, « ce sont les ‘honoraires’ d’une minute de consultation ! Mais il nous faut au moins quatre minutes pour le faire ! C’est un paiement dérisoire ! »
Mais ces économies sont demandées en raison d’un dépassement budgétaire pointé par le comité de l’assurance. Selon ce dernier, et surtout selon les mutuelles, le budget alloué aux téléconsultations devait être neutre. « Comment peut-on initier une nouvelle nomenclature pour le contact avec le patient tout en exigeant qu’elle soit budgétairement neutre ? », s’interroge le Dr Luc Herry.
Des avantages économiques indéniables
Les 6 millions de téléconsultations réalisées ont pourtant permis d’assurer un suivi des patients à moindre coût, avec une meilleure accessibilité pour les patients et un gain de bien-être pour les médecins. « Ces 6 millions de consultations ont généré 120 millions d’euros d’économies. Faites le calcul : une téléconsultation à 10 euros versus une visite à domicile à 35 euros ou une consultation au cabinet à 27 euros », explique le Dr Herry.
Cependant, il reconnaît que certaines téléconsultations n’ont peut-être pas été utilisées à bon escient par certains médecins généralistes, ce qui justifie l’instauration de contrôles et de quotas pour réguler cette pratique.
Une suppression qui pénaliserait tout le monde
Le Dr Herry estime que la téléconsultation est fortement menacée. À quoi peut-on s’attendre ? Les médecins pourraient privilégier les consultations en cabinet ou les visites à domicile, avec des honoraires plus élevés. Mais tout le monde y perdrait : les patients verraient leur accès aux soins se compliquer, les médecins perdraient en qualité de vie et l’INAMI devrait débourser davantage. « Assurément, ce n’est une bonne affaire pour personne », conclut le Dr Herry. L’ABSyM se réserve le droit d’accepter ou de modifier la proposition qui sera transmise par l’INAMI.
Un espoir du côté du GBO/Kartel
Le Dr Lawrence Cuvelier (GBO/Kartel) estime, lui, qu’il aurait été possible de trouver une autre solution, même provisoire. « L’idée de diminuer le remboursement des téléconsultations a laissé nos confrères complètement dépités. J’ai pu le constater en discutant avec eux. À la Médico-Mut, on était dans une impasse : chacun des partenaires (INAMI, mutuelles, médecins...) défendait son pré carré, et il était impossible d’avancer. Nous avons dû trouver une solution, mais celle-ci n’est pas satisfaisante pour les médecins généralistes. »
Une mesure provisoire ?
Le Dr Cuvelier espère que cette mesure ne sera que provisoire et que le nouveau gouvernement remettra de l’ordre. « Cela dit, nous ignorons dans quel sens les choses évolueront », ajoute-t-il. « Ce pourrait être pour annuler cette décision... ou pour aggraver la situation. »
Il souligne également que si des économies ne sont pas réalisées maintenant, les conséquences pourraient être encore plus désastreuses à l’avenir. Dans ce contexte, le président du GBO/Kartel anticipe une réduction de la norme de croissance à l’avenir. Quelle sera la réaction des médecins ? « On verra, mais elle ne sera certainement pas positive. En tout cas, une téléconsultation à moins de cinq euros est inacceptable », affirme-t-il. Le GBO a exposé en détail sa position dans une édition de Flash Info publiée hier, mercredi.
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