La vie sexuelle ne s’arrête pas net une fois le cap des 50 ou 60 ans franchi. Certes, elle se modifie, mais ne s’éteint pas. Une réalité qu’ont (plus que probablement) intégrée tous les MG s’occupant de patients âgés, et qu’ils encouragent si elle peut contribuer à l’épanouissement des intéressés. Mais les MRS qu’ils fréquentent sont-elles si réceptives à l’idée de pensionnaires toujours verts? L’UOAD, le cercle des MG dinantais, en débattra sous peu.

Il s’agit en effet du fil conducteur de son colloque gériatrie 2016, fixé au 19 novembre au Centre culturel de Dinant et intitulé: «La sexualité de la personne âgée: le soignant impuissant?». Un titre qui, derrière le jeu de mots, reflète les velléités qu’ont certains personnels de MR(S) d’interférer dans un domaine qui ne regarde a priori que le résident – à tout le moins si on est prêt à concéder qu’il est un adulte âgé dont l’autodétermination doit être respectée.

C’est le cas, assurément, du Dr Fery, co-organisateur du colloque. Ayant récemment levé le pied dans sa pratique de MG, il peut davantage se consacrer à la fonction de MCC (médecin coordinateur et conseiller) qu’il exerce dans les Résidences Churchill et Saint-Anne, à Dinant. Il a à cœur d’y développer des PSPA, des projets de soins personnalisés et anticipés, «pour que les aînés soient associés aux choix qui les concernent et que l’on sorte ainsi de cette mainmise des familles sur le devenir de leur parent». 

Christian Fery dit remarquer, comme la douzaine de MCC que compte l’arrondissement de Dinant, à quel point les familles peuvent réagir de façon virulente quand leur parent(e) noue une relation affective, voire plus, au sein de son institution. «Elles admettent généralement mal que leur parent, ou grand-parent, puisse encore vivre ce genre d’expérience ‘à son âge’.» La situation se corse si il ou elle est toujours marié(e), par exemple, et que sa moitié ne réside pas dans l’établissement. Aussi le cercle dinantais a-t-il choisi, entre autres orateurs, de faire appel pour démêler le «qui peut» du «qui doit» s’en mêler, à Me Jacques Fierens. Cet avocat et professeur à l’UNamur, spécialisé notamment en droit de la famille, évoquera les aspects juridiques de la problématique. Comme l’opposition des proches à la relation amoureuse, on l’a vu, mais aussi la question du consentement. Ne doit-on pas veiller, si rapprochement entre deux résidents il y a, à ce que chacun soit bien partant, le discernement non écorné par une démence naissante? Bref, s’assurer que la relation n’est pas subie?

Autre phénomène dont peuvent être témoins les MG qui suivent leurs patients au home: une tendance du personnel – «et d’après les retours qu’on a, il s’agirait surtout de soignants jeunes» – à considérer comme déplacés les manifestations de tendresse, les gestes affectifs entre personnes âgées, voire à rabrouer les tourtereaux. Le colloque du cercle commencera, pour creuser ce malaise, par des témoignages issus de la MRS le «Val des Seniors», de Chanly, évoqués au micro par le Dr Baudoin Demblon. A la pause, il est prévu de sonder les participants pour alimenter le débat: avez-vous été choqué par les témoignages de la résidence Val des Seniors? La sexualité des résidents est-elle un sujet tabou dans votre MRS? Qu’attendez-vous concrètement de votre MRS à ce sujet?... «Même s’il y a certainement eu des progrès ces dernières années, nous espérons aller au-delà des constats, pour comprendre le malaise», indique Christian Fery. A noter que l’UOAD a également invité à la tribune, pour partager un «regard éthique sur la sexualité des personnes âgées» et les flottements qu’elle engendre chez les soignants, le psychiatre Raymond Gueibe.