Loin de se laisser abattre par le fait que la Cour constitutionnelle ait jugé leur recours en annulation du tiers payant obligatoire non fondé, les MG Piet De Baets et Rufy Baeke – qui font partie d’un collectif de requérants – estiment que «l’arrêt met la ministre De Block dans ses petits souliers». Pour eux, celle-ci va devoir tenir compte de la disponibilité de MyCareNet dans la mise en œuvre de l’obligation.
Fin 2015, la Cour constitutionnelle avait été saisie, par l’ABSyM, le SVH et un collectif de plaignants emmené par le MG flamand Piet de Baets, de différents recours en annulation de l’article 20 de la loi du 17 juillet 2015, concernant l’instauration d’une obligation de tiers payant (TPO), envers les BIM, pour les MG. Les requérants avaient essentiellement basé leurs actions sur des violations du principe d’égalité et de non-discrimination (entre MG et spécialistes, entre conventionnés et non-conventionnées…) garanti par la Constitution (lire Medi-Sphere 534). La Cour ne les a pas suivis.
«Bien que, dans un premier temps, cette requête ait été rejetée par le Conseil d’Etat [il s’agissait d’une action en référé; une autre, sur la légalité de l’arrêté royal, est toujours pendante ndlr], la procédure s’est révélée très utile: il y a maintenant plus de clarté et de sécurité juridique», écrivent les Drs De Baets et Baeke. En effet, «la loi, devant être conforme à la Constitution, établit un lien entre le régime du TPO et l'accès à MyCareNet», soulignent-ils. Dans les développements de son arrêt du 20 octobre, la Cour indique que l'utilisation du réseau électronique MyCareNet pour vérifier l’assurabilité du patient (et la facturation électronique subséquente) est indispensable à l'application correcte du TPO et sans entraîner une charge de travail supplémentaire et disproportionnée.
Dès lors, pour eux, les MG qui n’ont pas accès à MyCareNet et qui ne disposent pas des outils numériques nécessaires, ne peuvent faire l'objet d'une obligation de travailler en tiers payant, eu égard à la charge administrative disproportionnée dont ils héritent. Un élément dont Maggie De Block «doit tenir compte dans la mise en œuvre et l'application de la mesure», concluent-ils non sans glisser au passage que, même les MG qui emploient déjà les logiciels labellisés de connexion à MyCareNet rencontrent maints problèmes techniques et supportent dès lors eux aussi une surcharge administrative.
«Un signal clair aux décideurs»
En outre, indiquent les deux MG flamands, la Cour constitutionnelle demandera au Conseil d'Etat de déterminer si et dans quelle mesure la ministre De Block serait allée au-delà du pouvoir qui lui est accordé – ici de déterminer les conditions dans lesquelles une obligation de remboursement s’applique aux mutuelles pour les prestataires de soins. Pour Piet De Baets et Rufy Baeke, la Cour fait ainsi «un lien indubitable avec la critique présentée devant le Conseil d'Etat sur le fait que seuls les médecins qui appliquent le TP via MyCareNet ont une garantie de paiement accordée par l’Inami».
Moralité, l’action pendante devant le Conseil d'Etat sur la légalité de l’arrêté royal «n’est certainement pas sans objet et peut donc se poursuivre avec droit et raison». Les deux leaders du collectif de requérants voient d’ailleurs d'autres motifs d’aller jusqu’au bout: le soutien moral et/ou financier de nombreux MG, en association ou individuellement, pour mener toutes les actions juridiques – et leur bas de laine leur permet de poursuivre la procédure devant le Conseil d’Etat – ou encore le fait que l’ABSyM ait également introduit en parallèle, avec d’autres arguments, une procédure devant cette instance. Mais surtout, les médecins plaignants veulent «donner un signal clair aux décideurs politiques de ce pays».