La spin off belge HeartKinetics a développé un dispositif médical qui permet au généraliste et au cardiologue de suivre la fonction cardiaque d’un patient à distance. Kino est le seul dispositif médical permettant une mesure directe de la contractilité cardiaque automatisée et à domicile.
Depuis de nombreuses années, la prévention des maladies cardiovasculaires fait partie des priorités de santé publique. En cette période de pandémie, l’impact des maladies cardiaques sur la dégradation des patients covid a encore accru l’importance d’une bonne prise en charge en la matière.
Avec HeartKinetics, Pierre-François Migeotte, physicien qui supervise les activités de recherche de l'unité de recherche LPHYS (service de Cardiologie de l'hôpital Erasme), entend améliorer le suivi des patients. « Notre priorité est de mettre en place un monitoring cardiaque qui soutient le traitement au quotidien de l’insuffisance cardiaque. Notre technologie donne une évaluation immédiate et complète de la condition du muscle cardiaque tant chronotrope, qu’inotrope. Concrètement, on veut pouvoir garder plus longtemps un patient à domicile. Avec la phase covid, des patients ont eu peur de se rendre à l’hôpital et notre application est aussi une opportunité à ce niveau. Elle pourrait permettre d’éviter une vague supplémentaire de complications cardiovasculaires lorsque la crise sera passée... »
Deux solutions
Avec le Pr Philippe van de Borne, Directeur du Département de Cardiologie de l’hôpital Erasme, Pierre-François Migeotte s’est investi à deux niveaux : une smart-App OKCARDIO et un dispositif, le Kinocardiographe, appelé KINO. « Il repose sur deux boîtiers permettant de compléter la mesure mécanique par une mesure électrique via électrocardiogramme. Nous voulons aider les professionnels de santé dans leur suivi parce que l’insuffisance cardiaque et les signes avant-coureur d’une décompensation cardiaque sont difficiles à diagnostiquer. Kino est le seul dispositif médical permettant une mesure directe de la contractilité cardiaque automatisée et à domicile. »
La téléconsultation
Cette application est d’autant plus accessible qu’elle est utilisable via un smartphone « Pour nous, OKCARDIO est un outil majeur de la téléconsultation. Quand on voit qu’en France, il y a eu plus de 5 millions de téléconsultations remboursées, la Belgique doit poursuivre son effort dans l’adoption des nouvelles technologiques. Je veux faire passer un message : ne soyons pas les derniers dans ce domaine. »
L’application s’appuie sur l’utilisation des capteurs de mouvements présents dans les smartphones : les accéléromètres et les gyroscopes. Cela permet de mesurer 6 paramètres vitaux : l’énergie et la force de votre cœur, la fonction d’éjection, la distribution d’énergie, le rythme cardiaque, le rythme respiratoire et la variabilité du rythme cardiaque. « En deux minutes, on a un examen avec les résultats pour le cardiologue ou le généraliste. Les données partent dans le cloud. »
Dans plusieurs hôpitaux
Aujourd’hui, HeartKinetics collabore avec plusieurs hôpitaux : « On travaille avec des médecins et des études sont en cours aux Pays-Bas et en Allemagne et même à Singapour. En Belgique, nous travaillons avec les hôpitaux Erasme et Brugmann et nous sommes en discussion avec le CHU de Charleroi »
L’intelligence artificielle
Actuellement, au travers de toutes ces collaborations, l’équipe entraîne le système de l’intelligence artificielle : « Ce type d’intelligence artificielle peut aider un généraliste à la décision ou un cardiologue pour faire un suivi régulier. Concrètement, les données sont envoyées à un réseau de neurones artificiels capables d’évaluer à partir de ce flux de paramètres des changements dans la fonction d’éjection systolique et d’en déduire une mesure de la contractilité cardiaque. » Actuellement, une centaine de patients participent à cet entraînement : « On espère atteindre les 300 à 500 patients. »
Une interface dédiée au cardiologue lui permet de consulter l’historique complet des mesures effectuées par ses patients pour une meilleure vision d’ensemble et un suivi personnalisé.
L’avenir et le remboursement
L’arrivée de l’application est prévue pour le troisième trimestre 2021 en attendant un remboursement à terme : « Nous avons réfléchi à un paiement à l’acte lors d’une téléconsultation. On peut envoyer au patient un lien pour faire les mesures. On est sur un paiement de moins de 10 euros à l’acte. C’est tout bénéfice pour le patient et les finances de la santé publique. Si avec moins de 10 euros, on peut trier les patients, on entre dans une efficience de la santé. » Il rappelle que « la distance et les problèmes de mobilité sont un des enjeux du manque de suivi. »
Dans l’espace
Cette application prendra aussi la direction de l’espace : « Notre dispositif de recherche a déjà été dans l’ISS...et nous serons dans l’espace avec un astronaute à la fin 2021. J’ai toujours été passionné de l’espace. Pour rappel, la fonction cardiaque dans l’espace s’affaiblit et on doit l’étudier pour permettre aux astronautes d’atteindre Mars un jour. » A ce niveau la spin off a reçu le soutien de l’agence spatiale européenne.