De l’intérêt d’échanges médecin prescripteur-infirmier exécuteur

L’Ordre des médecins s’est penché sur la question de la poursuite, par un infirmier à domicile, d’un traitement occasionnant de graves effets secondaires, quand le médecin traitant, dûment prévenu, ne réagit pas. Il explore les limites de la liberté thérapeutique des médecins et insiste pour que toute suspension de l’exécution de la prescription soit immédiatement signalée au médecin.

L’autonomie professionnelle des médecins n’est pas illimitée, rappelle l’Ordre. La liberté diagnostique et thérapeutique est supposée «se dérouler selon la norme de prudence (en rapport avec la responsabilité) pour les actes pour lesquels on est peu ou pas qualifié, les critères médico-scientifiques, les lignes directrices, les règles de consensus et le peer-review». Il y a du reste des restrictions d’ordre économique posées par la législation AMI pour éviter la surconsommation, s’appuyant sur des indicateurs de bonne pratique ou ce que font des pairs confrères normalement prudents et diligents dans des circonstances similaires. Sa liberté, enfin, n’exonère pas le médecin de respecter les droits des patients, en ce compris l’information sur les alternatives au traitement. Il s’agit donc d’une «liberté réglementée», résume l’Ordre, dans les limites de ce qu’il «convient» de faire.

Comment doit réagir un infirmier, si en dépit de remarques réitérées de sa part, un médecin traitant poursuit un traitement se soldant par de graves effets secondaires? La liste des prestations techniques de soins infirmiers (prestations B1 ou B2) et des actes qui peuvent être confiés par un médecin à des infirmiers (actes C) est reprise dans un AR de 1990, signale l’Ordre, en ajoutant qu’il incombe au prescripteur de fournir à ceux-ci les instructions indispensables à ce qu’ils exécutent les actes correctement et les informer des risques liés à un acte, indique-t-il. «Le médecin doit également garantir l'accompagnement et le contrôle nécessaires, ce qui est essentiel pour la responsabilité éventuelle du médecin en cas de ‘faute’ de l'infirmier lors de l'exécution de telles prestations et d'actes médicaux confiés, d'autant plus dans le cas des prestations B2 pour lesquelles une prescription médicale est nécessaire.» On voit que la communication entre ces deux acteurs est jugée primordiale. A la prescription écrite, doit s’ajouter un échange oral «et ce, certainement s'il y a des problèmes médicaux déterminés ou s'il faut répondre à des questions concrètes sur les soins».

Arrêt et recherche de solution

L’Ordre fait référence à une circulaire ministérielle 2007 relative à l’arrêté sur les actes infirmiers, qui indique que lorsqu'il est demandé à un infirmier d'effectuer des actes qu'il ne maîtrise pas suffisamment (de par son expérience et/ou formation) ou qu'il n'est pas en mesure d'effectuer en toute sécurité, cet infirmier doit refuser et en informer immédiatement son supérieur hiérarchique ainsi que le médecin prescripteur. «L'infirmier ne peut donc tout simplement pas être ‘contraint’ d'exécuter des actes prescrits, sûrement pas ceux qui causent, manifestement déjà, un préjudice prouvé (dans ce cas, même des dommages) au patient, en raison aussi des responsabilités partagées», enchaîne l’Ordre. S’il y a refus/suspension motivé(e) de l'exécution de certains actes prescrits, le médecin doit en être averti aussitôt, «en attendant une solution adaptée au problème». L'infirmier pourra également en aviser patient et famille.

 

Le raisonnement complet du Conseil national, fort résumé ci-dessus, peut être lu sur son site www.ordomedic.be. L’Ordre signale encore que l’instance à alerter face à un «abus de liberté thérapeutique» est le conseil provincial concerné, où la pertinence des soins prescrits pourra être examinée inter pares.

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