Le thiopental, utilisé pour pratiquer les euthanasies, est temporairement indisponible, annonçe le CBIP, qui désigne le propofol comme seule alternative. Cet exemple récent nous ramène à la problématique globale des pénuries rencontrées en officine pour des produits bien plus courants.
Le thiopental, utilisé pour pratiquer les euthanasies, est temporairement indisponible, annonçe le CBIP, qui désigne le propofol comme seule alternative. Le problème devrait être solutionné en juillet «mais il n’est pas certain que les stocks existants dans les hôpitaux seront suffisants». Cet exemple récent nous ramène à la problématique globale des pénuries rencontrées en officine pour des produits bien plus courants. Elle faisait la Une en fin de l'année passée. L’APB a participé, comme l’Inami et le pharma, à des groupes de travail à l’Agence des médicaments (afmps). Voit-elle une évolution?
Pour Alain Chaspierre, des mesures intéressantes ont découlé de ces travaux. Il tient à préciser le décor. «Vous avez des indisponibilités ‘vraies’, qui concernent +/- 400 médicaments [sur 10.000 codes CNK]. Ce n’est pas nouveau, mais ça a tendance à s’accentuer. Avec la pression sur les prix des anciens médicaments, les fabricants, pour rationaliser les coûts, ne se dotent plus que d’un nombre limité voire d’un seul site mondial de production. Au moindre pépin - de matières premières, de transport… - il peut y avoir rupture.»
Pour limiter les suites, l’afmps a élaboré un arbre décisionnel qui donne les alternatives envisageables, dont éventuellement la magistrale ou une autorisation momentanée et conditionnelle, pour la firme concernée, d’importer des lots de l’étranger, poursuit le président de l’APB. Les prescripteurs devraient être à l’avenir plus vite informés de ces solutions via leurs logiciels. Par ailleurs, toute indisponibilité de plus de 3 jours doit être signalée à l’afmps, contre 14 auparavant.
Ne livrer que le marché belge
D’un autre côté, reprend Alain Chaspierre, il y a «les indisponibilités dues au contingentement, qui représentent 50% des problèmes. L’industrie est confrontée à l’exportation de médicaments vers des pays de l’Union où ils sont vendus plus chers. Cette pratique, qui n’est pas illégale, perturbe les plans de production par pays. En réaction, l’industrie a fixé des quotas. Une fois atteints, les pharmacies ne sont plus approvisionnées. Elles doivent s’adresser directement à la firme pour commander un maximum de 5 boîtes.» Une enquête interne fait dire à l’APB que les pharmaciens passent 4 à 5 heures par semaine à se démener pour garantir la continuité des traitements.
«Une loi a été voté dernièrement [MB 08/05, ndlr], qui avait notre faveur vu que le problème empoisonne vraiment le quotidien. Elle n’empêche pas l’exportation, mais oblige les grossistes à clarifier leur statut : vous avez les ‘grossistes’ qui peuvent exporter et les ‘grossistes-répartiteurs’ qui, eux, sont tenus de ne fournir que le marché belge. La loi leur impose désormais d’être clairs sur leur activité, de sorte à ce que les firmes sachent s’il y a risque d’exportation.»
On peut donc s’attendre à ce que les pénuries soient partiellement endiguées, à tout le moins quand les arrêtés d’exécution seront pris ? «Il faudra voir la suite. La loi est déjà attaquée, par 4 firmes spécialisées dans l’export, devant la Cour constitutionnelle…» Pour le président de l’APB, il faudra bien que les pouvoirs publics arbitrent un jour, entre les intérêts économiques de quelques-uns et les impératifs de santé publique. Lui voit dans la problématique des indisponibilités «une autre dérive de la marchandisation de la santé».
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