Medi-Sphere a relayé ces derniers temps un (f)lot de réserves suscitées dans les rangs des MG par l’informatisation à marche forcée, les (futures) obligations de type recip-e. Les autorités y sont-elles perméables? De source syndicale, il nous revient que de petits signes laissent penser que oui. Mais rien d’officiel. Un lecteur de Wegnez ajoute sa voix aux protestations. L’informatique, il adore. Mais l’accumulation de manœuvres sur une même consultation devient ingérable.
Voici ce qu’il rapporte à Medi-Sphere.
«Cela fait des lustres que je suis informatisé. En fait, j’adore ça. Mais trop is te veel! Quels sont ces enragés qui ont pondu toutes ces absurdités obligatoires?
Quand tout fonctionne bien, au niveau électricité et connexion internet, il me faut au moins 10 minutes pour que tous mes programmes soient ouverts. «C’est votre ordinateur», va-t-on me répliquer. Peut-être, en partie. Mais c’est loin de tout expliquer.
Il faut ouvrir le programme qui est sur un serveur distant, se connecter une fois ce programme ouvert, sur eHealth, vérifier la carte d’identité électronique du patient, checker le DMI…
Lors des consultations, il arrive de plus en plus fréquemment que le patient vous dise: «Vous pouvez aller chercher mon certificat directement sur le net, Docteur» – par exemple des certificats Medex, Medconsult, de la police, SNCB, SWDE… mais aussi les certificats sportifs de certaines fédérations. Les gens ne se présentent même plus au cabinet avec les documents, ils attendent de leur médecin qu’il surfe sur le net, durant la consultation, pour aller chercher la version en ligne. Où va-t-on s’arrêter?
Et c’est la même chose avec les Bf, on procède maintenant par voie électronique. Ainsi que pour la commande des tests de dépistage FOBT sur la plate-forme officielle. Si on n’a pas reçu un rapport, un courrier de spécialiste, le patient vous rétorque: «Mais vous pourriez très bien aller le chercher via le Réseau santé wallon, hein, Docteur?».
C’est hallucinant! Oui, on peut TOUT faire du bout des doigts, en pianotant sur un clavier d’ordinateur. Mais on est quand même là pour une consultation, pour écouter, diagnostiquer et soigner un patient!
Récemment, la presse médicale relayait que le DMI était une source de burn out (*). J’en suis tout à fait conscient maintenant… Car tout cela est très facile, quand chaque opération est prise séparément. Mais l'accumulation, sur la même consultation, est éreintante.
Et cette addition de manœuvres informatiques se fait au détriment du temps à consacrer au patient, de la concentration à maintenir pour bien faire notre métier. Quelqu’un, dans les hautes sphères, peut-il – veut-il – entendre ce message? Là, j'ai vraiment envie de hurler…»
Dr B. S. , MG à Wegnez
(*) Une étude menée aux USA par l’American Medical Association et la Mayo Clinic, publiée l’été dernier, porte sur les impressions de plus de 6.000 médecins sur l’usage des dossiers médicaux informatisés, des prescriptions électroniques et des portails web. Une analyse multivariée prenant en compte l’âge, le sexe, la spécialité (…) a établi que les confrères employant des DMI et l’e-prescription étaient plus insatisfaits du total de temps consacré aux tâches administratives; informatisation et e-prescription étaient également associées à une augmentation du risque de burn out.