Comment Maxime Prévot, ministre régional de la Santé, réagit-il à la décision de sa collègue du fédéral de geler l’agrément de nouvelles maisons médicales au forfait? Sans enthousiasme, comme on l’imagine. Lui-même a fait de ces structures un rouage de choix dans la réorganisation de la première ligne wallonne. Doutant qu’un moratoire soit une bonne idée, il promet d’interpeller Maggie De Block «en l’invitant à une réelle concertation à ce sujet».
Rétroactes. Au sortir du conclave budgétaire, une douche froide s’est abattue sur le secteur des maisons médicales (MM). Maggie De Block a décrété un moratoire sur la reconnaissance de nouvelles MM au forfait, le temps d’un audit sur leur fonctionnement, non sans laisser encore passer à travers les mailles du filet les dossiers introduits à l’Inami avant le 8 octobre (lire Medi-Sphere n°532).
Pourquoi ce frein à l’essor des MM? Parce que leur budget augmente de 10% par an, explicite Maggie De Block, atteignant à présent les 150 millions. Et qu’il faut s’interroger sur la façon de mieux faire tourner et réglementer le secteur. Le moratoire devrait dégager 7 millions. L’audit sera attribué par marché public – ce n’est pas encore fait – et les conclusions rentrées encore en 2017, d’après le cabinet – ce qui présage une longue période d’inertie.
Comment le ministre régional Maxime Prévot prend-il cette initiative? «J’ai eu vent des intentions de la Ministre De Block (…). Si je peux comprendre la démarche de vouloir poser un diagnostic du modèle au travers d’un audit, je ne pense pas qu’un moratoire soit une bonne idée. Je ne manquerai pas de l’interpeller en l’invitant à une réelle concertation à ce sujet.»
Qu’objecte le n°2 de l’exécutif wallon à ce gel? Un impact sur les patients les plus fragiles socialement, une efficience contestable sur le plan budgétaire avec un simple déplacement des coûts de santé, et un coup d’arrêt porté au développement de structures synonymes de plus de transversalité et de multidisciplinarité. Maxime Prévot: «D’une part, [la décision] touche à la question fondamentale de l’accessibilité des soins de santé de qualité. Par le fait de fonctionner au forfait, ces maisons médicales attirent un public socialement vulnérable. Ne plus permettre l’agrément de nouvelles structures de ce type représenterait de facto un frein en termes d’accessibilité.»
Le ministre wallon déclare aussi s’interroger sur l’efficience d’une telle mesure. «On évoque 7 millions d’euros d’économies, c’est clairement une vision à court terme. En rendant la visite chez le généraliste moins accessible, le public fragilisé reporterait dès lors plus facilement celle-ci au risque d’aggraver son état de santé. Inévitablement, cela entraînera une augmentation du coût des soins de deuxième ligne, ainsi que du coût des prestations à l’acte au niveau de la première ligne.»
Enfin, Maxime Prévot, auteur cet été d’une note-cadre sur l’optimalisation de l’organisation de la première ligne de soins wallonne, souligne que cette dernière «doit évoluer vers plus de transversalité et de multidisciplinarité. Pour faire face à la chronicité des maladies, notamment, mais également aux exigences des professionnels de la santé en matière d’organisation du travail. (…) Nous faisons face à une pénurie de médecins généralistes dans une bonne partie des communes wallonnes. L’avenir est donc plus que jamais à la pratique groupée et multidisciplinaire et donc aux maisons médicales.»
En conclusion, il est à ses yeux «plus que regrettable» de vouloir freiner le développement de celles-ci «en imposant la seule formule des prestations à l’acte. Laissons aux professionnels de la première ligne de soins, le choix de la formule qui convient le mieux à leur patientèle mais également à leur choix de vie.»