Patient décédé : ce que peut communiquer le médecin à un assureur (Ordre)

Le Conseil national de l'Ordre des médecins a été interrogé concernant les informations médicales que le médecin d’une personne décédée peut communiquer dans le cadre de l’exécution d’un contrat d’assurance.

L'article 61, alinéa 4, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances énonce que « pour autant que l'assureur justifie de l'accord préalable de l'assuré, le médecin de celui-ci transmet au médecin-conseil de l'assureur un certificat établissant la cause du décès ».

L’interprétation des conditions et limites auxquelles cet article soumet la levée du secret médical fait débat dès lors qu’il s’agit de concilier le respect de la vie privée d’une personne décédée et la bonne exécution du contrat d’assurance.

S'agissant de déroger au secret médical protégé par l'article 458 du Code pénal, le Conseil national estime qu’il est prudent que le médecin s’en tienne aux termes de cet article.

1. Il revient à l’assureur de prouver que l’assuré a consenti de son vivant à ce que son médecin délivre un certificat établissant la cause de son décès au médecin-conseil de l’assurance.

La loi ne prévoit pas que le bénéficiaire de l’assurance puisse pallier le défaut de consentement de l’assuré.

2. Le certificat établissant la cause du décès est à communiquer sous pli fermé au médecin-conseil de l’assureur et non directement à ce dernier.

3. La loi prévoit que l’information est communiquée par le médecin du patient décédé. Celui-ci ne doit pas être nominativement désigné par le patient de son vivant.

Sans préjudice du droit des proches d’avoir accès par l’intermédiaire d’un praticien professionnel au dossier d’une personne décédée (article 9, § 4, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient), il n’est pas acceptable qu’ils désignent le médecin-conseil de la compagnie d’assurances pour exercer leur droit de consultation indirect du dossier afin de lui permettre de recueillir les informations qu’il juge utiles à l’exécution du contrat d’assurance (cf. avis du 25 novembre 2006 sur la consultation du dossier médical d’un défunt par le médecin-conseil d’une compagnie d’assurances, BCN 115, mars 2007, p. 3 ; avis du 21 juin 2013 de la Commission fédérale droits du patient concernant les modalités relatives au droit de consultation indirect du dossier d’un patient décédé).

Si le décès est investigué dans le cadre d’une procédure judiciaire, il n’y a pas d’objection déontologique à ce que le médecin expert judiciaire soit chargé, à la demande des proches, par l’autorité qui l’a mandaté, de préciser la cause du décès à l’assureur.

4. La levée du secret porte sur la cause du décès.

Les compagnies d’assurances, notamment, défendent une interprétation fonctionnelle de l’article 61, alinéa 4, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances. Elles considèrent qu'il a pour objet de permettre à l'assureur de vérifier que le dommage est couvert par l’assurance souscrite et que l'assuré a respecté ses obligations contractuelles (dont l’obligation de déclarer, lors de la conclusion du contrat, toutes les circonstances connues de lui et qu'il doit raisonnablement considérer comme constituant pour l'assureur des éléments d'appréciation du risque).

Pour cette raison, il arrive que les informations qu’elles réclament ne se limitent pas à un certificat établissant la cause du décès.

Le Conseil national estime qu'il est prudent de la part du médecin, tenant compte de la disposition précitée, de ne communiquer qu’un certificat établissant la cause du décès.

La cause du décès (par exemple l’intoxication médicamenteuse) n’est pas à confondre avec la nature du décès (accident, suicide, iatrogène).

En cas d’incertitude, il convient de préciser que la cause du décès est indéterminée.

La question de la légalité d’une clause par laquelle un assuré consent à ce que son médecin communique après son décès davantage d’informations que le seul certificat établissant la cause de celui-ci relève de l’appréciation des cours et tribunaux.

Dans les situations litigieuses, il appartient à la juridiction saisie de décider le cas échéant d’entendre le médecin au titre de témoin ou d’ordonner la production de pièces du dossier médical.

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