« Ce serait ridicule, alors que les projets pilotes soins intégrés aux malades chroniques commencent à produire des effets et que tant d’argent y a été consacré, que la dynamique s’arrête. C’est en tout cas notre avis, à l’UCL », indique le Pr Macq, de l’IRSS-UCLouvain (Institut de recherche santé et société).
Début octobre, l’IRSS a tenu une après-midi studieuse rassemblant une petite centaine de personnes, sur place et à distance. En mode narratif, les projets francophones Boost, Pact, Résinam, Chronicopôle et ChroniLux ont conté leur déploiement, avant que, à la faveur de la défense de la thèse de doctorat en santé publique d’Anne-Sophie Lambert, on ne se concentre sur la façon d’évaluer l’innovation dans les soins de santé.
« L’idée était de mettre en avant le chemin parcouru par les projets », explique Jean Macq. Pour lui, ceux-ci commencent à porter leurs fruits dans le mieux-soigner-ensemble, après une progression par étapes. Et d’illustrer par quelques exemples comment ils ont ajouté progressivement des ‘couches’ d’initiatives, élargi leur action, drainé des acteurs nouveaux.
Pour ne citer que Pact [région du Centre, public cible : les porteurs de maladie chronique invalidante, ndlr], le projet a commencé par une activité très centrée MG, avant d’évoluer vers l’approche ‘UTIL’, du nom de ces ‘unités thérapeutiques intégrées locales’ qui assurent des bilans de santé dans les communes desservies, prodiguent des conseils diététiques individualisés, proposent des activités physiques adaptées, donnent du feedback au médecin traitant - qui n’est plus la seule porte d’entrée des parcours. « En somme, les projets sont partis d’actions spécifiques, ont pris connaissance des réalités locales, ont fait évoluer leur modèle pour s’y inscrire et permettre une meilleure organisation – l’intégration - des soins et la formation d’un réseau de soins, d’aide et de prévention pour une population et un territoire. »
Pour notre interlocuteur, le bilan est donc plutôt encourageant. Mais une récente évaluation des projets par les autorités ne fait-elle pas peser sur certains le spectre d’un arrêt, pour – notamment – inclusion insuffisante de patients ? « C’est exact. Sous le gouvernement précédent, des indicateurs ont été définis pour cerner l’efficacité des projets. Si on n’y répond pas, on est vite étiqueté comme ‘mauvais’. L’inclusion est l’un des critères, très mécanique, retenus. Pourtant, il ne veut pas dire grand-chose à lui seul », regrette le Pr Macq. Ainsi y a-t-il de grandes différences, entre projets, sur l’ « intensité » des actions à mettre en œuvre pour qu’un bénéficiaire soit comptabilisé parmi les enrôlés. Pour Jean Macq, les quelques projets wallons sur la sellette déploient actuellement des efforts louables pour rester dans la course.
Renforcer, un impératif très actuel
L’exécutif De Croo est trop fraichement installé pour qu’on prédise le sort qui attend la dynamique des soins intégrés. La déclaration gouvernementale ne semble pas vouloir l’enterrer, en tout cas. On se souviendra qu’un des pères du concept n’est autre que Ri De Ridder, qui a été chef de cabinet d’un certain… Frank Vandenbroucke (et qui d’après nos informations pourrait le redevenir NDLR) , observe Jean Macq.
Toujours est-il qu’à l’IRSS, même si l’évaluation des projets dont l’institut était chargé par convention avec l’Inami est terminée, on croit à cette évolution. « Nous continuons d’y travailler, avec la PAQS notamment. L’idée est de produire un référentiel de principes guidant le développement de soins intégrés, en lien avec un ‘mooc’, un cours en ligne, qui devrait commencer en 2021. »
Renforcer l’organisation des soins est plus que jamais d’actualité, dit-il, à la fois pour affronter les défis connus (vieillissement, chronicisation des pathologies…) et les crises comme la covid.
Les enregistrements vidéo des présentations de projets ont été mises à disposition par l’IRSS, provisoirement sur You Tube.