Drogues: crack et cannabis frelaté inquiètent l'Europe, sur un marché qui se diversifie

Comme pour beaucoup d'autres secteurs, l'offre et la consommation de drogues illicites ont été perturbées dans un premier temps par la pandémie de Covid-19 avant de s'adapter et de connaitre un rebond, ressort-il du rapport 2022 de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA). Ce document, publié mardi par l'instance dirigée par le Belge Alexis Goosdeel, pointe les nombreux défis qui se présentent en Europe à mesure que le marché des drogues se diversifie et innove.

La disponibilité des drogues reste élevée à travers l'Union, et elle dépasse pour certains produits, comme la cocaïne, les niveaux d'avant la pandémie, analyse l'observatoire. Plusieu rs indicateurs suggèrent que la disponibilité de la cocaïne, brièvement perturbée par l'éclatement de la pandémie sur le continent, continue d'augmenter au fil des ans. Un "volume record de 213 tonnes de cocaïne a été saisi dans l'UE en 2020" (dont 70 tonnes en Belgique), et on y a également détecté de plus en plus de laboratoires secondaires de transformation de la cocaïne. 

Élément inquiétant: certaines données semblent montrer que la consommation de crack, forme cristalline de la cocaïne qui en général se fume (mais peut aussi être injectée), se répand progressivement, même si c'est encore à une échelle limitée. Cette forme de drogue, surtout observée en Europe chez des personnes vulnérables et marginalisées (sans abris, entre autres), "est particulièrement associée à des problèmes sanitaires et sociaux" (risques accrus d'infection au VIH et virus de l'hépatite C via injection, tendance à la consommation intensive et à la combinaison avec d'autres abus, agressivité, etc.), met en garde l'observatoire. La Belgique fait partie des pays qui ont rapporté observer des signaux de consommation croissante. 

"Une analyse des eaux usées municipales réalisée en 2021 dans 13 villes européennes" dans le cadre d'un projet européen, "a permis de détecter des résidus de crack dans toutes les villes lors de tous les jours d'échantillonnage, les charges les plus élevées ayant été signalées à Amsterdam et à Anvers", illustre le rapport. 

Le cannabis reste quant à lui la drogue la plus populaire. Plus de 22 millions d'adultes européens déclarent en avoir consommé au cours de l'année écoulée.

Sans pouvoir se baser sur des données 2021 complètes, l'Observatoire européen des drogues s'inquiète d'une évolution récente sur ce marché en Europe: une hausse des signalements de cannabis frelaté avec des cannabinoïdes de synthèse, qui imitent les effets du THC, le principe actif du cannabis naturel. "Les cannabinoïdes de synthèse fortement dosés peuvent provoquer une intoxication plus grave et des effets mentaux, physiques et comportementaux plus intenses que le cannabis, des intoxications aiguës et mortelles étant signalées", peut-on lire dans le rapport. Vu un procédé de fabrication parfois imprécis, certains produits contenant à l'insu du consommateur des cannabinoïdes de synthèse peuvent avoir une répartition très inégale de cette substance, ce qui augmente le risque d'ingérer une quantité toxique. Les produits à base d'herbe et de résine, à faible teneur en THC, seraient une base privilégiée pour les criminels actifs dans ce trafic. 

"Le message à retenir de ce rapport peut être résumé en trois mots: Everywhere, Everything, Everyone. Les drogues classiques n'ont jamais été aussi accessibles et de nouvelles substances fortement dosées continuent d'apparaître (Everywhere). Aujourd'hui, presque tout ce qui présente des propriétés psychoactives peut être une drogue (Everything), étant donné que les frontières s'estompent entre les substances licites et les substances illicites. Et tout le monde (Everyone) peut être touché, directement ou indirectement, car les problèmes de drogue aggravent la plupart des autres défis sanitaires et sociaux importants auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui", a résumé mardi le directeur de l'observatoire, Alexis Goosdeel.

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