Depuis juillet 2017, la présidence de l’Union européenne revient pour six mois à un pays qui a opté pour une société numérique au service de la collectivité. Comment cela se traduit-il dans le domaine de la santé? A la veille de la grande conférence #eHealthTallinn qui se tiendra dans la capitale du pays entre le 16 et le 18 octobre 2017, Danielle Siarri (Himms) a rencontré le ministre estonien de la santé et du travail, Jevgeni Ossinovski.
Jevgeni Ossinovski est ministre de la santé et du travail de la République d'Estonie depuis le 23 novembre 2016. Par ailleurs, il est président du parti social-démocrate depuis le 30 mai 2015. L'objectif de la conférence eHealth de Tallinn est de promouvoir le dialogue sur la santé dans la société numérique et la société numérique au service de la santé grâce aux données de santé gérées par le patient, à des soins abordables et de qualité, à l'innovation en matière d'e-santé et à la dimension économique de la santé.
Que signifie la présidence de l'Union européenne (UE) pour le secteur de la santé numérique en Estonie?
L'une de nos conférences de haut niveau lors de la présidence aura pour thème La santé dans la société numérique et la société numérique au service de la santé (#eHealthTallinn).
Cette conférence apportera un éclairage pratique sur l'état de l'art dans le domaine des solutions de santé numériques: comment celles-ci vont influencer la vie quotidienne des citoyens, des entreprises, des chercheurs, des systèmes de santé et des communautés en général. Elle représentera pour les décideurs et acteurs une opportunité unique d'appréhender les évolutions politiques et technologiques les plus récentes ainsi que de prendre part aux discussions qui dégageront la feuille de route des actions à prendre dans le cadre de la stratégie du marché unique numérique afin de profiter pleinement des bénéfices de la santé numérique tant au niveau des individus que de la société en général.
Que signifie l'e-santé pour les citoyens estoniens?
Au cours de la rencontre informelle des ministres de la santé à Tallinn les 20 et 21 juin, nous avons abordé la manière de promouvoir les innovations numériques dans la santé en mettant l'accent sur les opportunités du marché unique numérique, tout en supprimant les barrières liées à l'innovation grâce aux données et aux échanges transfrontaliers de données en matière de traitement et de recherche. En outre, les discussions ont portés aussi sur les droits des citoyens d'accéder, de contrôler et de gérer leurs propres données de santé. D'ici la fin de l'année, nous espérons dégager un consensus sur les conclusions de ce conseil pour bénéficier de l'appui politique nécessaire de la part des ministres de la santé sur le futur agenda «e-santé» et sur la coopération transfrontalière dans ce domaine.
Quel est l'avenir d'une santé durable?
«The future is already here - it's just not evenly distributed», comme le disait William Gibson (en 2003). Le futur de la santé sera personnel et les systèmes de santé resteront économiquement viables comme ils le sont aujourd'hui, sauf que nous en saurons beaucoup plus sur chaque individu et que les outils numériques nous aideront à apporter des soins nettement plus pointus et à assurer une meilleure coordination, de même qu'ils permettront de gérer le financement de notre système de santé sur base de résultats quantifiables afin d'en garantir la pérennité. Le futur se met progressivement en place.
Qui contrôle les données de santé personnelles en Estonie?
Il est dans l'intérêt de la collectivité que les systèmes de santé visent à réduire leurs déficits d'efficacité dans la mesure où cela garantira leur durabilité. Si nous voulons que les citoyens prennent mieux en main leur santé et que les systèmes de santé répondent mieux aux besoins individuels des patients, nous devons permettre aux citoyens de contrôler davantage leurs données de santé et de les utiliser dans leur propre intérêt. J'estime que chacun devrait disposer d'une solution pratique et fiable de gestion numérique de ses données personnelles de santé.
Quelles sont quelques-unes des expériences que l'Estonie peut partager pour alimenter le débat durant le sommet de Tallinn?
- 100% des cabinets de médecins de famille et hôpitaux utilisent des dossiers médicaux informatisés depuis plus de dix ans déjà;
- 100% des prestataires de soins en matière de santé échangent leurs dossiers médicaux avec d'autres prestataires de soins;
- 99% des prescriptions sont numériques (e-prescriptions);
- 70% des recommandations des médecins sont numériques;
- 30% de la population adulte accèdent à leur dossier médical en ligne dans le système national d'information sur la santé;
- 5% de notre population adulte ont donné leur sang à la banque du génome dans le cadre d'un génotypage et 70% souhaiteraient y participer si l'Etat leur en donnait l'occasion.
Les 28 Etats-membres de l'Union européenne sont confrontés aux défis de l'échange transfrontalier de données, du dossier médical électronique, de l'e-prescription, du vieillissement de la population et de la qualité de soins abordables pour le citoyen. Ces six mois de mandat sont l'occasion pour chaque présidence de l'UE de permettre à tous les Etats-membres de partager leurs bonnes pratiques durant la semaine de l'e-santé et de relever les défis mis en lumière par l'ensemble des pays de l'UE.
Et pour tous les participants à l'eHealth de Tallinn en Estonie, il s'agit là d'une occasion unique de faire entendre leur voix et de prendre en compte les défis et opportunités liés à l'accès pour chaque citoyen à sa propre santé numérique, à la dimension économique de la santé et à la gestion par chacun de ses soins.
Cet article a également été publié sous un autre titre sur le site de HIMSS EUROPE.