Les cliniques St-Luc dédient la journée de l'hémophilie aux femmes et aux progrès

À l'approche de la journée mondiale de l'hémophilie ce dimanche, les cliniques universitaires Saint-Luc veulent sensibiliser au fait que les femmes restent parfois mal prises en charge et faire connaître au grand public les récentes innovations thérapeutiques.

Cette maladie rare qui provoque une déficience de la coagulation du sang concerne quelque 350.000 personnes dans le monde, dont un millier en Belgique. Mais elle est assez bien connue dans la population générale. "Quand des enfants se présentent aux urgences avec des gros bleus, l'hémophilie n'est pas le premier diagnostic qui va être évoqué, surtout quand c'est une forme sporadique d'hémophilie, qui n'est pas liée à une transmission dans une famille d'hémophiles mais à une nouvelle erreur génétique", explique Cédric Hermans, chef du service d'hématologie aux cliniques universitaires St-Luc.

Il relativise aussi l'assertion selon laquelle il s'agit d'une maladie typiquement masculine, les gènes codant pour les facteurs de coagulation déficitaires dans l'hémophile étant localisés sur le chromosome sexuel X. "Les hommes (X-Y) sont les plus sévèrement affectés, car ils n'ont reçu que le chromosome X affecté de leurs mères. Mais des femmes (X-X) conductrices de l'hémophilie peuvent aussi se retrouver avec un problème de coagulation important si c'est le chromosome X non porteur de la maladie qui est mis au repos. Aujourd'hui, quand on a devant nous un patient hémophile, on se préoccupe de plus en plus des femmes de la lignée, pour s'assurer que celles qui ont des problèmes de coagulation et qui ont par exemple des règles abondantes soient bien informées et suivies. Le mouvement #MeToo a permis d'amplifier cette problématique".

Pour les femmes vectrices de l'hémophilie qui envisagent une grossesse, la fécondation in vitro permet de poser des diagnostics pré-implantatoires et de sélectionner des embryons non porteurs de la maladie, mais la procédure est lourde. Les innovations thérapeutiques actuelles constituent donc aujourd'hui des alternatives providentielles. 

Les personnes qui souffrent d'un déficit en facteurs VIII (hémophilie A) n'ont dorénavant plus à s'en injecter deux fois par semaine par voie intraveineuse. Ils peuvent s'administrer, simplement par voie sous-cutanée, des anticorps remplissant la même fonction, et ce une seule fois par mois car ils perdurent plus longtemps dans l'organisme. "La Belgique est un des pays au monde où ces nouveaux médicaments sont les plus largement proposés aux patients", note le Pr. Hermans. "On est des précurseurs".

Si c'est le facteur IX qui est manquant (hémophilie B), les traitements restent encore intraveineux mais, depuis quelques années, ils peuvent être administrés en moyenne tous les 10 jours, voire moins fréquemment encore, l'élimination des protéines produites en substitution en laboratoire ayant pu être ralentie.

De grandes avancées ont par ailleurs été faites au niveau de la thérapie génique, qui permet de corriger l'erreur à la source. Des hémophiles commencent à se voir injecter des adénovirus qui se logent dans le foie, lieu de production des facteurs de coagulation, et dont le contenu nocif a au préalable été remplacé par le matériel génétique faisant défaut. "Ce sont les propres cellules du patient qui vont, comme le ferait un sujet normal, produire du facteur VIII ou du facteur IX", explique encore le Pr. Hermans. "On espère pour l'avenir que le foie ne va pas perdre cette capacité avec le temps". Une trentaine de centres dans le monde s ont actifs dans ce domaine, dont deux en Belgique : les cliniques universitaires Saint-Luc, où deux patients ont bénéficié de la thérapie génique avec succès ces deux dernières années, et la KULeuven.

"Tous les progrès actuels ont un impact considérable sur la qualité de vie des patients", souligne le spécialiste. Le service d'hématologie de Saint-Luc n'oublie pas ceux atteints de longue date par la maladie et continue de traiter leurs complications articulaires douloureuses et invalidantes que les traitements moins efficaces du passé n'ont pas pu éviter.

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