Pour le GBO et le MoDeS, la Belgique s’est dotée d’un système de santé «basé sur l’équité», dont l’efficacité tient en grande partie à «un partage des risques solidaire». «Est-il moralement acceptable que certains détournent ces moyens et de la sorte, introduisent inégalités et discrimination?», questionnent-ils après le reportage ertébéen «Les médecins sont-ils devenus des requins?».
Le GBO et son partenaire de coalition le MoDeS, jeune syndicat ouvert aux spécialistes francophones, expriment leur inquiétude après le reportage médecins-requins, diffusé mi-février dans l’émission Questions à la Une. Ce que le travail des équipes de la RTBF a mis en lumière – à savoir des délais de consultation liés au versement de suppléments ou des refus d’intervention faute de chambre privée –, ce sont, disent les deux syndicats, des «dérives permises par la manière dont notre système de soins de santé est organisé», même si, et c’est heureux à leurs yeux, celui-ci autorise encore la population à accéder à des prestations de qualité sans devoir «passer par des systèmes privés». Ils rappellent au passage le risque d’éclosion d’une médecine à deux vitesses, inhérent à toute tentative de marchandisation du secteur.
Les «comportements déviants» épinglés par la RTBF ne sont pas représentatifs de la majorité des praticiens, garantissent le GBO et le MoDeS. Tout en affirmant s’en «désolidariser fortement», ils remontent aux racines du mal, en l’occurrence les facteurs structurels qui font émerger pareilles pratiques. Outre un mode de paiement «essentiellement à l’acte», arrivent en tête de liste «le déficit chronique et le sous-financement des hôpitaux (reconnu par la ministre De Block elle-même)» et la «contribution par le biais d’honoraires au financement des institutions de soins».
Figurent également dans l’inventaire des deux syndicats diverses carences au niveau de l’articulation entre la médecine générale et la sphère hospitalière: l’absence d’un tri efficace aux urgences, le manque d’échelonnement des soins induisant des consultations spécialisées inopportunes ainsi qu’un recours parfois excessif à l’hôpital, ou des mécanismes de collaboration entre MG et hôpitaux qui ne soient pas formalisés ni financièrement valorisés.
Si divers aspects du métier de médecin (étendue de la tâche, importance de la responsabilité, lourdeur des horaires…) justifient une rémunération adéquate, le GBO et le MoDeS s’étonnent «qu’un médecin s’attribue une valeur trois ou quatre fois plus élevée que le barème négocié. Il est encore plus interpellant que des patients puissent considérer que ce paiement leur garantit des soins de meilleure qualité. (…) Ethiquement et déontologiquement parlant, les médecins se doivent d’être à la hauteur de l’image que peut se faire la population de leur fonction.»