Pour contrer la déshérence de la médecine générale en zones rurales, les députés wallons cdH Fourny, Salvi, Leal Lopez, Arens et Moinnet formulent une proposition de résolution. Pour eux, préserver de l’équité dans l’accès aux soins de proximité entre tous les citoyens suppose des solutions spécifiques aux campagnes qui perdent leurs MG. Ils considèrent le développement des maisons médicales, avec cofinancement via des fonds européens liés au développement rural, comme une piste prioritaire.
Dimitri Fourny et consorts rappellent que la DPR, la déclaration de politique régionale 2014-2019, prévoit de «mettre le médecin de famille au cœur de la 1ère ligne de soins», en favorisant «le médecin généraliste comme pivot des parcours de soins du patient». Certes. Encore faut-il que MG il y ait... Et de pointer des situations critiques en province du Luxembourg, dans le sud du Namurois et, dans une certaine mesure, le sud du Hainaut. Une problématique dont le gouvernement wallon semble bien conscient, ayant d’ailleurs consigné dans la DPR qu’il faudrait améliorer les dispositifs favorisant l’installation des médecins dans les zones pénuriques.
Les difficultés particulières de la ruralité
Le cadastre dynamique, disponible depuis mai, «confirme malheureusement la pénurie annoncée de MG en Wallonie», font observer les élus cdH, soulignant que c’est bien dans cette région que se marque le recul (il y a sur ces dernières années 140 MG de plus en Flandre, contre 100 de moins en Wallonie), que la région ne compte que 28% de généralistes à avoir moins de 45 ans et que l’évolution globale de l’activité temps plein diminue, parce que la force de travail vieillit et/ou qu’elle accorde plus de place à la vie privée.
Les auteurs de la proposition rappellent les facteurs pouvant influer sur l’attractivité – en l’occurrence à la campagne – tels que listés en 2008 par le KCE, dont le fait que le praticien soit lui-même issu du milieu rural et que sa famille aussi y trouve des opportunités et facilités (en matière d’emploi, de loisirs, de crèches, d’écoles, etc.). Idem pour la rétention, où jouent de plus des variables telles que le soutien professionnel, la présence ou l’absence d’autres généralistes, des possibilités de formation, des hôpitaux à proximité… Dimitri Fourny et consorts enjoignent de reconnaître les difficultés particulières liées à la ruralité et son maillage hospitalier moins dense. «Il faut proportionnellement plus de médecins généralistes là où la densité de population est plus faible, puisque les distances à parcourir sont plus grandes…»
47 en 2009, seulement 52 six ans plus tard
Si Impulseo I a pu jouer positivement dans ce cadre, il «identifiait en 2013 encore 108 communes wallonnes à faible densité de MG». «Il faut malheureusement reconnaître qu’il n’a jusqu’ici pas pu atteindre son objectif.» Dès lors, «en parallèle à de nouvelles mesures qui doivent être prises en amont au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles (enseignement supérieur) et du Fédéral (organisation des gardes, planification de l’ordre des professions de santé), il convient que la Région wallonne décide également du renforcement des Associations de santé intégrée (ASI) [ndlr, le «nom wallon» des maison médicales], comme soutien à la profession de médecin généraliste, en particulier dans les zones rurales.»
Où en est-on sur le sol wallon, justement, au niveau du développement de ces structures collectives? «Leur nombre est passé de 47 en 2009 à seulement 49 en 2013, pour atteindre le chiffre de 52 aujourd’hui.» Bref, une évolution qui «n’est pas significative», et «donc encore insuffisante». Dès lors, la proposition de résolution déposée à la mi-juillet vise «à mettre une nouvelle fois en avant le rôle que les maisons médicales peuvent jouer dans la lutte contre la pénurie en zone rurale. [Elles] offrent en effet un cadre structurant à la profession de médecin généraliste en Wallonie.»
Objectif 15% de couverture
Il faut que les pouvoirs publics cassent, disent les députés humanistes, le cercle vicieux du renoncement à s’installer là où il y a peu de confrères, donc beaucoup de sollicitations et de gardes. Mais ce ne sera pas tout de créer de nouvelles ASI, «encore faut-il les répartir utilement sur ce territoire», font-ils observer. Pour eux, c’est le moment, durant cette législature 2014-2019, de donner un coup d’accélérateur à ces politiques incitatives, les enjeux étant importants et la Région wallonne ayant désormais la main sur l’organisation de la 1ère ligne de soins – le dispositif Impulseo est ainsi, depuis le 1er juillet 2014, devenu une compétence régionale.
Actuellement, indiquent les députés, la couverture de la population wallonne est de 5,5%, via 52 structures ASI agréées, alors que le souhait de la Région wallonne est d’atteindre les 15% de couverture. Ils demandent donc au gouvernement une série d’actions, dont celle d’évaluer Impulseo I pour le renforcer et d’associer à la réflexion les acteurs de terrain, ou encore de développer des collaborations entre l’Observatoire wallon de la santé et les ASI pour définir une vision claire et évolutive de la situation sur le territoire wallon.
Cofinancement et benchmarking
Il s’agit du reste, dit la résolution, «de s’assurer, dans le cadre de la programmation 2014-2020 du Programme wallon de développement rural (PWDR) – financé en partie par les fonds européens du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) –, que via des appels à projets, les ASI existantes et nouvelles implantées en milieu rural postulent au cofinancement FEADER et en soient bénéficiaires.» Le soutien porte sur les investissements en infrastructure, matériel ou équipements.
La proposition invite aussi à réaliser (et rendre publique) une étude comparative des pratiques de la médecine générale dans les régions voisines, afin de s’inspirer de ce qui apparaît comme le plus efficace.
Enfin, les signataires appellent de leurs vœux un bilan, devant le parlement wallon, au 1er octobre 2016, «des avancées réalisées dans le cadre de la réforme annoncée à propos de la 1ère ligne de soins».