Les premières Assises de la transformation durable des institutions de soins ont été organisées ce mardi 13 juin sur le site hospitalier de Godinne par les équipes du CHU UCL Namur. 

Aujourd’hui, le défi climatique est de taille pour l’hôpital qui devra réussir à prodiguer des soins de santé décarbonés tout en s’adaptant aux changements de la société. Quels sont les véritables enjeux de la transition ? Intelligence collective, décarbonation de la santé et limitation de l’impact environnemental des activités de soins, formation des acteurs de soins aux enjeux énergie-climat-environnement... les thématiques sont nombreuses. 

Pauline Modrie Bio-ingénieur au CHU UCL Namur et membre des Shifters Belgium, a développé avec ses collègues ce projet : « Nous avons accueilli une bonne centaine de participants et la salle était comble avec des représentants des hôpitaux de toute la Wallonie et de Bruxelles lors de cet événement gratuit et éthique. On sait ce que l’on doit faire et il faut convaincre tous les intervenants : la supply chain, les mutuelles, les fournisseurs, les politiques, les médecins,... Il est essentiel qu’aujourd’hui toutes les institutions et les acteurs de soins puissent partager les bonnes pratiques déjà existantes et qu’ils puissent réfléchir ensemble aux meilleures stratégies permettant d’aller vers des soins moins impactants au niveau climatique et environnemental, dans la lignée de l'objectif 2050 de la neutralité carbone à l'échelle planétaire. L'objectif final est d’identifier collectivement une série de leviers d’actions pour les institutions de soins et les pouvoirs publics à mettre en place à moyen et court terme. » 

Créer des Green Team dans les hôpitaux 

La Belgique s’est engagée lors de la COP26 à rendre son système de santé low carbon et résilient. « Le problème, c’est qu’on n'a pas de plan au niveau de nos institutions de soins pour aller vers la neutralité carbone de notre système de santé en 2050. C’est pourquoi les Shifters Belgium et le CHU UCL Namur se sont associés pour mettre en œuvre ces Assises qui ont pour but d’identifier collectivement les leviers d’actions pour des institutions de soins plus résilientes et durables. »  
La mesure du bilan carbone est importante aussi. « Il faut créer des Green Teams dans les hôpitaux tout en écoutant les réflexions des anesthésistes, des chirurgiens, des infirmier.ère.s par rapport aux déchets des salles d'opération. »Sur le terrain, les expériences sont de différents types comme la création par le Centre hospitalier de Mouscron d’un Escape Game pour des soins plus durables. Les chirurgiens et anesthésistes du CHU UCL Namur s’engagent quant à eux à travailler sur la diminution des déchets au bloc opératoire (simulation d’une opération et identification des opportunités de tri). De son côté, Anne Berquin, médecin spécialiste de la gestion de la douleur chronique (professeur aux CUSLW) et auteure d’un livre sur les soins de santé en transition a rappelé que rien ne pourrait se faire sans « la pédagogie de la transition », soit une méthode qui permette d’enseigner la transition écologique à l’hôpital aux professionnels de la santé).
 Les médecins sont prêts à apprendre 
Les médecins sont prêts à cette évolution : « Nous avions de nombreux médecins présents : ils sont enthousiastes, mais ils se rendent compte qu’ils n’ont pas été sensibilisés à cette thématique dans leur enseignement. Souvent, ils sont intéressés d’apprendre les enjeux liés à leur profession et à leur pratique pour mieux l’appliquer sur le terrain. » explique Pauline Modrie : « Or, la réflexion doit aussi se poursuivre au niveau technologique pour les sociétés qui créent les dispositifs médicaux et les sociétés pharmaceutiques. Tout le monde doit revoir et faire évoluer son mode de fonctionnement. »
Pour sa part, Emmanuel André, Médecin microbiologiste et chercheur de KULeuven, estime que « les changements climatiques sont la plus grande menace de santé aujourd’hui pour l’humanité en affectant directement la stabilité et la vulnérabilité des écosystèmes et aussi en accroissant le risque de pandémie ». Un avis partagé par David Grimaldi, Médecin réanimateur à Erasme et Membre des Shifters Belgium pour qui il faut  « une approche systémique indiquant que les différents éléments du système de soins à décarboner sont liés, il s’agit également de diminuer la part de « soins inutiles » afin de réduire les gaspillages du système de santé. » 

« Un hôpital à taille locale aussi »

De son côté, Marie-Céline Jamoye, Conseillère en stratégie au CHC Liège, réfléchit à quel pilotage adopter pour créer une dynamique de changement durable et efficace dans les institutions de soins. Dans le cas du Groupe Santé CHC, il s’agit d’une démarche globale et participative. Elle a insisté sur « la création d’un réseau d’ambassadeurs pour une dynamique de développement durable à l’hôpital. »
La notion d’Eco-conception des soins est importante pour le Dr Grégoire Wieers, Médecin infectiologue à la Clinique Saint-Pierre Ottignies:  « Pour des soins plus durables, il faut adopter une éco-conception de la démarche diagnostique avec un recentrage sur l’approche clinique afin d’éviter les examens et les traitements inutiles qui ne sont pas bénéfiques pour les patients. » Dans ce contexte, l'hôpital et son impact local seront un atout comme le confirme le Félix Scholtès, Neurochirurgien et créateur de l’association for Health For Future , qui a insisté sur « l’enjeu de la santé planétaire et l’importance des groupes d’actions locales pour y répondre. »
Rendez-vous est déjà pris pour l’année prochaine,...