Alors que le Plan alcool interfédéral vient d'être dévoilé, l'alcoologue Martin de Duve, qui a été consulté à deux reprises lors de son élaboration, se dit déçu par les modifications apportées entre le document qui lui a été soumis en janvier et la version finale. "La plupart des recommandations des experts n'y figurent pas", a-t-il indiqué à l'agence Belga.
"L'alcool est la deuxième cause de mortalité évitable juste derrière le tabac, et engendre un coût social et sanitaire pour l'État estimé à 4,2 milliards d'euros par an. Il est donc grand temps de prendre des mesures qui protègent non pas les intérêts privés de certains mais les intérêts publics d'une population tout entière", a estimé Martin de Duve, alcoologue et directeur de l'asbl Univers Santé.
Les 75 mesures adoptées sont "totalement insuffisantes" quand on sait que "près de 14 % des Belges présentent une consommation problématique d'alcool, que 7 % en sont dépendants, et que près de 9.300 Belges mourront de leur consommation chaque année", a souligné M. de Duve. "Nous sommes devant un problème d'accès aux soins puisque les consultations chez un alcoologue ne sont pas remboursées".
Même si on ne pourra plus vendre d'alcool la nuit le long des autoroutes, il déplore le fait que l'alcool reste disponible dans des endroits dont ce n'est pas la vocation. "Si on limitait la vente d'alcool aux magasins alimentaires ou spécialement dédiés, on éviterait la banalisation de la surconsommation. "L'alcool reste le produit psychotrope le plus important après le tabac et on le trouve partout: chez le boucher, à la librairie...", a expliqué le directeur de Univers Santé.
Il estime anormal que les valeurs nutritives de l'alcool ne soient pas indiquées sur les emballages. "C'est le seul produit que nous ingérons dont nous ne pouvons pas connaître la composition. La population devrait pouvoir choisir ce qu'elle consomme en fonction du nombre d'unités d'alcool contenues dans un emballage. Une bière spéciale de 33cl peut contenir jusqu'à 4 unités d'alcool", a-t-il encore souligné.
Selon lui, le plan alcool devrait être plus restrictif encore avec la publicité et les opérations marketing afin de protéger le jeune public. "La publicité fait appel aux émotions. Or, le cortex préfrontal qui gère les émotions n'est formé qu'à partir de 25 ans. Sous cet âge, on est donc plus vulnérable à la publicité. Comme lorsqu'on souffre déjà d'addictions", a précisé M. de Duve qui espère que l'évaluation des mesures prévue en 2025 permettra d'aller plus loin dans la lutte contre la consommation nocive de l'alcool en Belgique.
Derniers commentaires
Charles KARIGER
30 mars 2023Et si l'on se décidait enfin à cesser de considérer que la responsabilité pénale d'un délit (ou un crime) y compris les infractions de roulage est atténuée par l'imbibition alcoolique mais à juger que c'est une circonstance lourdement aggravante?
Doubler les peines, si le fait a été commis sous l'influence de "substances" (dont l'alcool et le CNB, bien sûr) pour commencer.
Tant pis pour les alcooliers, même s'ils sont religieux. Jusqu'au XIXème siècle, il était moins dangereux de boire de l'eau ou du lait que de la bière ou du vin mais ce n'est plus le cas depuis bien longtemps.