La loi sur les droits des patients a passé le cap de ses 20 ans. Les choses ont bien évolué depuis lors et des adaptations s’avéraient nécessaires. Après une série de débats et de rencontres, le ministre Vandenbroucke a confié à des juristes la tâche de rédiger un avant-projet de loi visant à modifier la loi de 2002. Cet avant-projet a été publié et tout un chacun avait jusqu'à aujourd'hui 18 avril – journée européenne des droits des patients – pour faire connaître ses remarques. Mais qu’en pensent les médecins ?
L’ABSyM fait un certain nombre de remarques et exprime une série de craintes. Elle vient de faire parvenir à ce sujet une lettre au ministre Vandenbroucke. Elle y souligne « le caractère précieux de la relation médecin-patient et l’obligation de respecter dans cette relation le serment d’Hippocrate et le code de déontologie ». La qualité des soins et les droits du patient, encadrés par des précisions juridiques, en font partie, ajoute l’ABSyM. Mais elle s’inquiète du risque de voir « l’emprise croissante exercée par le droit sur cette relation, pousser à une médecine défensive et créer pour les médecins une série de difficultés dans la pratique ». Ainsi, précise-t-elle « l’implication du patient dans l’ensemble du processus qui concerne son état de santé suppose qu’il fournisse à son soignant toute l’information pertinente qui lui permette de prodiguer des soins adéquats et de les planifier ».
La prise en charge du patient par une équipe, résultat de l’évolution des connaissances et des pratiques, peut poser de nouvelles difficultés. « Lorsque le patient est pris en charge par une équipe, la responsabilité est partagée mais cela conduit à une incertitude juridique. Le traitement pourra s’en trouver impacté, dans la mesure où chaque membre de l’équipe voudra se couvrir sur le plan médico-légal. » L’implication croissante du patient est un autre résultat de l’évolution de la pratique. Elle est soutenue par l’AbSyM « pour autant toutefois qu’elle ne soit pas source de conflits entre la fourniture de soins et le respect des droits du patient. La loi doit préciser comment le médecin peut se défendre si la position du patient va à l’encontre des connaissances scientifiques. Cela sans alourdir les tâches administratives du médecin. »
L’article 7 de l’avant-projet précise que l’information doit être fournie par écrit en cas de situation complexe. Mais, demande l’ABSyM, « qui définit ce qu’est une situation complexe ? Quelle est l’implication pratique de cet article de la future loi ? Comment gérer l’information ? » Et d’ajouter que « des réponses à ces questions sont nécessaires. » D’autres questions encore sont soulevées par le fait que le secret professionnel tombe à l’égard de la famille après le décès du patient. « Comment gérer cela en cas de discussions dans la famille : à qui doit-on donner copie ? Et quid si le patient, de son vivant, ne le souhaitait pas ? Cela aussi devrait être clarifié par la loi », réclament les responsables syndicaux.
Ils font encore une autre remarque à propos de l’information du patient : « il vaudrait mieux que l’échelonnement de l’information soit restreint à des situations dans lesquelles l’exception thérapeutique est en jeu. » Toujours à propos de l’information, l’enregistrement sonore d’un entretien est source de préoccupation : « le patient doit-il informer le professionnel qu’il prend un enregistrement ? Doit-il lui en fournir une copie immédiatement ou au plus tard dans les 24h ? »
Enfin L’ABSyM déplore qu’un certain nombre de notions ne soient pas définies dans le projet de loi, par exemple « objectifs », « objectifs de santé », … Par contre « le devoir d’information est élargi, ce qui ajoute encore des tâches bureaucratiques et des prestations, pour lesquelles il n’est pas prévu de rémunération ». En conclusion de sa lettre, l’ABSyM demande au ministre de tenir compte de toutes ces réflexions.
Le GBO, quant à lui, se félicite des modifications apportées à l’avant-projet de la loi sur les droits des patients. Son président le Dr Paul De Munck, se réjouit que la proposition ne rende pas systématique le droit du patient à consulter les annotations personnelles introduites dans le dossier par le professionnel de santé. Ces annotations ne sont accessibles « que si le patient exerce son droit de consultation par l’intermédiaire d’un professionnel des soins de santé » (chapitre III, article 9, §2). « Nous avons fortement plaidé pour cela et nous l’avons obtenu » dit le Dr De Munck. « Il reste que certaines questions se posent encore », ajoute-t-il. Après examen, « le GBO/Kartel ne manquera pas transmettre ses réflexions aux autorités. »
Ci-dessous (1) un exposé général, (2) un avant-projet des modifications contenant une discussion article par article, et (3) le projet de loi coordonnée que l'on retrouve sur le site de Frank Vandenbroucke
Annexe 1 - avant-propos.pdf
Annexe 2 - modifications.pdf
Annexe 3 - coordination.pdf
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