Faut-il recentrer le rôle des mutuelles?

Le récent congrès de l'ABSyM, rapporté par Le Spécialiste, a relancé le débat sur le rôle des mutuelles. Le Dr Patrick Zygas et le Dr Elodie Brunel plaident pour un recentrage de leurs missions, limitant leur action au remboursement des soins et exigeant plus de transparence. Pour eux, il est urgent de réduire la bureaucratie et de contrôler davantage ces organismes.

«Les mutuelles sont des asbl. Quand j’ai suivi mon cours de management hospitalier, un des professeurs disait avec humour que les mutuelles sont plutôt des associations à lucre sans buts», commente le Dr Zygas, chirurgien orthopédiste (Chirec Delta), et conseiller communal MR à Uccle . «Cette description est remarquable et circonscrit bien ce qu’on peut penser des mutuelles. Les sociétés et asbl sont obligées de déposer leurs comptes à la Banque carrefour des entreprises. Les mutuelles n’ont pas cette obligation. Elles gèrent leur argent, mais n’ont pas de comptes à rendre.

En outre, les mutuelles sont un tremplin pour devenir ministre. Songeons à Jean-Pascal Labille, à Alda Greoli. Le rôle des mutuelles doit être limité au remboursement des soins de santé aux patients. Aujourd’hui, leurs missions sont multiples. Il faut les recentrer. D’autres organismes peuvent intervenir auprès des patients sans devoir concentrer toutes ces responsabilités au niveau des mutuelles. Elles ne doivent pas, par exemple, s’occuper de rembourser des voyages à la montage, de vendre des bandages ou des médicaments.» 

«Avec la facturation électronique et la digitalisation, une partie des tâches des mutuelles a été supprimée», ajoute le Dr Elodie Brunel (Absym). «Elles ont pu réaliser d’importantes économies en réduisant le nombre de leurs employés. Leur budget a-t-il été diminué en conséquence? Dans le cadre du budget 2025, les organismes assureurs se permettent de juger que nous dépassons de 216 millions le budget prévisionnel et que nous devons réaliser en médecine générale une économie de 68 millions en supprimant la consultation téléphonique. Par contre, on ne touche pas au budget des mutuelles. Il est grand temps de taper du poing sur la table et de rééquilibrer les choses. Les OA doivent également faire des économies.» 

Le public présent au débat a également protesté contre la charge administrative que les mutuelles répercutent sur les patients. «Plus il y a de paperasse à remplir par les médecins, moins les mutuelles doivent se préoccuper de leurs patients», a-t-il déclaré. Et «les AO ne peuvent-ils pas jouer un rôle important dans la réinsertion des malades chroniques de longue durée qui sont souvent des chômeurs de longue durée?»

Pour le Dr Zygas, la question essentielle est de savoir qui «va imposer aux mutuelles le changement. Cela ne sert à rien de discuter si quelqu’un n’exerce pas la tutelle sur les mutuelles. Qui peut avoir un pouvoir assez important pour peser sur les mutuelles? Il faut un accord du futur gouvernement sur ce sujet. Il est important de désigner et renforcer cette tutelle». 

C'est le ministre Vandenbroucke qui a cette tutelle, s'est amusée Kathleen Depoorter, pharmacienne et députée N.VA invitée au débat.,  «Les programmes du MR et de la N-VA sont largement similaires sur ce point. Il va de soi que les mutuelles ne doivent pas profiter du fait que les patients restent malades. Si vous ramenez ces patients au travail, cela doit être récompensé. C'est notamment ce que nous faisons avec la «fit note». En ce qui concerne la charge administrative, nous devons évoluer vers un certificat unique. Pour les médicaments, on a déjà commencé pour simplifier la catégorie IV.»

Kathleen Depoorter souhaite également réduire le rôle des mutuelles. Elle estime que les paiements pourraient être effectués par un système central, comme en Flandre pour le Growth Package, et certains moyens des OA pourraient être transférés aux associations de patients. Elle pense qu'il est important de recentrer les OA sur des tâches evidence based.

La députée Depoorter a également illustré le poids trop important des mutuelles dans les organes de l'Inami : au cours de la législature précédente, le nombre de représentants au Comité de remboursement des médicaments a été réduit de 18 à 16, mais les OA y ont encore une majorité de blocage. «Cela ne va pas de soi. Ils peuvent décider quels médicaments sont examinés et remboursés. De plus, les mutuelles prennent le contrôle des hôpitaux et organisent des pharmacies. De plus, si les pharmacies sont déficitaires, les moyens financiers de ce 1,25 milliard sont détournés vers elles. L'Autorité belge de la concurrence (BMA) s'est saisie de cette question. En outre, la loi stipule que les mutuelles doivent payer elles-mêmes les remboursements erronés aux patients, mais elles ne tiennent pas compte de cette loi.»

> Lire l'intégralité de l'article dans Le Spécialiste #226

Lire aussi : Mutuelles: «Il ne faut pas jeter l’enfant avec l’eau du bain» (Xavier Brenez)

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Derniers commentaires

  • Jacques MAIRESSE

    04 novembre 2024

    Je suis sidéré des propos de ces médecins, le rôle des mutuelles est essentiel, il participe à l’équilibre des forces (médecins, politiques, syndicats, patronat…etc) qui déterminent la politique de santé en Belgique. Travaillons ensemble… ce sera le meilleur pour le patient!