Récemment, deux circulaires du SPF Santé publique sont venues chambouler l’organisation de la garde en médecine générale. Le « Tri en nuit noire », c-à-d entre 23h et 8h du matin n’est plus assuré par le 1733, mais incombe aux postes médicaux de garde (PMG). En outre, le soir et la nuit, les PMG ont désormais l’obligation de mobiliser deux médecins : un sur place au poste de garde pour les consultations et un pour les visites à domicile. Pour l’ABSyM Wallonie, ces obligations ne sont pas fondées vu le faible nombre d’appels en soirée et la nuit.
Pour rappel, c’est Liège qui a posé en 2009 les premiers jalons du 1733 ; il portait le nom de Tri Salomon. Celui-ci était basé sur un protocole de tri des appels élaboré en concertation entre les cercles de médecins généralistes et les médecins hospitaliers. Ce sont les cercles de médecins généralistes qui assumaient la responsabilité de ce tri.
En 2012, la mise en place du 1733 plaça le tri sous la responsabilité de l’Etat. La centrale 1733 d'Arlon (qui couvre les provinces de Liège et Luxembourg) se basa sur un protocole hérité du Tri Salomon. Celle de Mons (qui couvre les provinces du Hainaut, de Namur et du Brabant wallon) limita les visites à domicile du médecin pendant la nuit noire : entre 23h et 8h, le préposé du 1733 n’envoyait aucun médecin au domicile du patient à l’exception de quatre situations : les résidents maison de repos, les patients en soins palliatifs, les patients qui souffrent d’une douleur intolérable et le besoin d’un certificat de décès. En 2019, un protocole fédéral fut élaboré. Les cercles de médecins généralistes dépendant du 1733 d’Arlon décidèrent d’instaurer, eux aussi, le tri en nuit noire.
En novembre 2022, une circulaire du SPF Santé publique vint brutalement mettre fin à ce système. Elle précise en effet que désormais, l’opérateur de la centrale 1733 peut envoyer les patients au PMG le soir et la nuit. Et tout récemment, le mois dernier, une seconde circulaire du SPF Santé publique est venue préciser ce que signifie concrètement la première. Elle stipule que le soir et la nuit, les PMG ont désormais besoin de deux médecins : un sur place au poste de garde pour les consultations et un pour les visites à domicile.
Pour l’ABSyM Wallonie, ces récents changements ne se justifient en aucun cas au vu du peu d’appels en soirée et la nuit. Ils ne viennent que faire gonfler le budget nécessaire pour la garde et accroître la pénibilité d’une profession déjà en pénurie, en augmentant le nombre de gardes à réaliser par chaque médecin généraliste.
Ces deux décisions ont déclenché la colère de nombreux cercles de médecins généralistes qui n’écartent pas la possibilité d’une grève de la garde en nuit noire.
Afin d’éviter d’en arriver à cette extrême, l'ABSyM Wallonie demande :
- le rétablissement du droit d'une centrale 1733 de restaurer le tri de nuit noire, ne prévoyant l’envoi d’un médecin au domicile du patient que dans des cas précis et limités ;
- le rétablissement du droit de fermer les postes de garde le soir et la nuit en ne gardant qu’un seul médecin de garde pour les visites à domicile.
Enfin, l’ABSyM Wallonie rappelle qu’il est vivement conseillé à tous les citoyens de se choisir un médecin généraliste attitré, qui connaîtra au fil des ans leur situation personnelle et médicale de manière privilégiée, et que le service de garde n’est là que pour les besoins de soins non programmables.
Du côté du cabinet du ministre fédéral de la Santé publique Frank Vandenbroucke, on souligne que cette décision était nécessaire, afin d'harmoniser le fonctionnement du 1733 sur le territoire et de pallier certains problèmes rencontrés. Le numéro avait notamment été plusieurs fois mis hors-service au cours du mois de février, ce que le docteur Guy Delrée, président de la Fédération des associations de généralistes de la Région wallonne (FAGW), avait condamné dans une lettre adressée au SPF Santé.
"J'ai écouté attentivement les inquiétudes des médecins généralistes. D'ailleurs, j'ai déjà élaboré des solutions, en concertation avec eux, pour résoudre le problème aigu du 1733 qu'ils soulèvent", a précisé jeudi le ministre à ce sujet. "Nous investissons actuellement des ressources supplémentaires dans le renforcement des postes de garde de médecins généralistes, non seulement le week-end mais aussi en semaine", conclut-il, ajoutant qu'une concertation est nécessaire pour attribuer ces investissements "de la manière la plus ciblée possible".
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