150 faillites de cabinets médicaux depuis 2018

Avec les nouvelles règles concernant les professions libérales, les médecins peuvent être déclarés en faillite. Depuis 2018, date du changement de régime, le nombre de faillites de cabinets médicaux a atteint les 150, avec  quelques légères fluctuations d’année en année. Mais le nombre de spécialistes concernés est le plus souvent supérieur à celui des généralistes. Quant aux fluctuations, il y a peut-être une explication…

Depuis mai 2018, les professions libérales sont considérées comme des entreprises. Leurs titulaires sont tenus de prendre un numéro d’entreprise. Les médecins n’y échappent pas, qu’ils pratiquent en personne physique ou en société. Ils sont soumis aux règles régissant l’insolvabilité des entreprises. Autrement dit, ils peuvent être déclarés en faillite.

Les statistiques des faillites de médecins faisaient état en 2018 de 28 cas, dont 13 médecins
généralistes et 15 spécialistes. Depuis lors, ce chiffre s’est accru en 2019 avec 39 faillites mais on
observe une légère diminution pour les deux années suivantes : on relève 21 cas pour l’année 2020
comme pour 2021. Vient ensuite une sorte de rebond avec 35 cas en 2022. Pour l’année en cours, on
en comptait 6 à la fin avril. Au total depuis l’entrée en vigueur des nouvelles règles, le nombre de
faillites de cabinets médicaux s’éleve donc à 150 jusqu’à la fin avril 2023. Signalons en passant que
les faillites de dentistes et celles des « autres activités pour la santé humaine » (ex. kinésithérapie, logopédie, laboratoires, soins infirmiers hors hôpitaux et résidences…) suivent le même mouvement d’accalmie relative, suivie d’une remontée en 2022.

Nombre de faillites de médecins, dentistes et «autres activités de santé»Source: Statbel l’office belge de statistique

Le tableau montre le plus souvent un nombre plus élevé de spécialistes que de généralistes en cessation de paiement. Cela peut sans doute s’expliquer par deux raisons au moins: les investissements, donc les charges plus importantes pour les spécialistes, d’une part, l’habitude plus ancienne des spécialistes à travailler en société, d’autre part.

«Mais il n’est pas impossible que la proportion des généralistes en difficulté augmente dans les années à venir.» commente le Pr Christian Melot, vice-président francophone du Conseil National de l’Ordre des Médecins. «Avec l’obligation de dépôt des comptes, la surveillance financière est plus suivie et peut-être détectera-t-on plus de situations précaires. Mais en même temps, une détection précoce permettra de prendre des mesures adéquates et d’éviter un certain nombre de catastrophes». On constate en effet qu’en 2022 le rapport généralistes/spécialistes est inversé. Mais la différence est mince et il serait aventureux d’avancer des hypothèses explicatives.

Quant aux fluctuations du nombre de faillites, il est malaisé d’expliquer le recul des faillites en 2020-2021. Mais la remontée pourrait avoir un lien avec la crise sanitaire. La baisse d’activité, enregistrée surtout au début de la pandémie, a engendré une diminution des rentrées. C’est avec retard qu’on voit apparaître la hausse des faillites, sans doute parce que le contre-coup n’a finalement pas pu être absorbé par un certain nombre de cabinets, malgré une reprise d’activité intense par la suite. Les victimes de cette crise étaient-ils des sociétés de médecins ou des pratiques en solo? C’est difficile à dire: les chiffres de 2022, par exemple, ne nous donnent qu’une faible proportion de cabinets où le nombre de salariés est supérieur à 4. Et il n’est pas précisé dans les statistiques qui sont les salariés : des médecins eux-mêmes ou du personnel auxiliaire?

Salariés des cabinets en faillite en 2022

Spécialité

Salariés

Nombre de cabinets

Médecine générale

0-4

16

5-9

3

Autres spécialités

0-4

16

5-9

1

La faillite d’un médecin n’est pas sans poser des problèmes déontologiques: qu’advient-il des patients et de leur dossier? Le Pr Melot rappelle qu’une procédure est prévue à cet effet. Sur base d’une liste de volontaires présentée par l’Ordre, le juge en charge de la faillite nomme un co-praticien de l’insolvabilité. Il y en a actuellement 12 en activité. Le co-praticien est chargé du repérage et de la sauvegarde des dossiers médicaux des patients. Il contacte alors ceux-ci et se charge de transmettre le dossier au médecin qui assurera le suivi du patient. A noter que le médecin pris dans une faillite de société médicale peut reprendre son activité à titre d’indépendant. S’il n’y pas de successeur connu ou désigné par le patient, l’Ordre conservera le dossier dans ses archives. C’est un travail fastidieux, dont la difficulté peut dépendre de la proportion de dossiers «papier» par rapport aux dossiers informatisés. Un des cas les plus difficiles qui soit survenu est celui d’un médecin en faillite qui est décédé.

Mais il ne faut pas oublier, dit Christian Melot, qu’à côté de l’aspect financier, il y a souvent aussi une détresse morale. L’Ordre s’efforce d’y répondre avec «Médecins en difficulté» et autres «Commission Professionnelle et Sociale (CPS)» telle que le Conseil de Bruxelles- Brabant wallon a été le premier à mettre sur pied.

> Lire aussi: 12 co-praticien de l'insolvabilité pour accompagner les confrères en faillite

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Derniers commentaires

  • Charles KARIGER

    12 juin 2023

    Bof ! Une consultation en « présentiel »,… quelle ringardise ! En France, les faillites peuvent pleuvoir, là-bas, la modernité est déjà en marche.

    "Un abonnement à 11,90€ / mois pour téléconsulter un médecin chaque fois que vous en avez besoin, tous frais compris.
    Vous ne parvenez pas à obtenir un RDV avec un médecin ? Vous avez besoin d’une réponse à une question de santé ou d’un avis médical ? Téléconsultez facilement un médecin 24h/24 et 7j/7.
    Une fois l’abonnement souscrit, aucun surcoût ne vous sera demandé, toutes vos téléconsultations sont incluses. "
    https://www.ramsayservices.fr/assistance-24-7

    À l'image de Netflix, chaque membre de la famille (enfants, conjoint et parents compris, peut-on lire) peut bénéficier de téléconsultations en illimité.
    La filiale précise toutefois sur son site « que le nombre d'appels au service de téléconsultation avec un médecin est accessible à tout moment sous réserve d’en avoir un usage raisonnable » qu'il fixe, dans ses conditions générales d'utilisation, à 20 appels par an.


  • Charles KARIGER

    12 juin 2023

    Bof ! Une consultation en « présentiel »,… quelle ringardise ! En France, les faillites peuvent pleuvoir, la modernité est déjà en marche.
    Voyez donc.
    " Un abonnement à 11,90€ / mois pour téléconsulter un médecin chaque fois que vous en avez besoin, tous frais compris.
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    La filiale précise toutefois sur son site « que le nombre d'appels au service de téléconsultation avec un médecin est accessible à tout moment sous réserve d’en avoir un usage raisonnable » qu'il fixe, dans ses conditions générales d'utilisation, à 20 appels par an.