France: la vaccination en pharmacie, toute naturelle?

Un sondage a été mené chez nos voisins français par OpinionWay auprès de quasi 6.000 clients de 18 ans et plus s’étant présentés au premier trimestre 2016 au comptoir de 65 officines réparties sur tout le territoire. Fil rouge du coup de sonde: la vaccination est-elle, peut-elle être, une future mission du pharmacien? 

L’enseignement principal de l’opération est que la vaccination semble être considérée par les clients comme une tâche naturelle de leur pharmacien: 90% des répondants déclarent faire confiance à celui-ci pour procéder à une vaccination, la tranche d’âge des 60-69 ans apparaissant comme particulièrement ouverte à l’idée. Quasi huit Français sur 10 se prononcent pour une autorisation de la vaccination en officine (39% se disent «très favorables» et 39% «assez favorables»); on ne dénombre que 8% de participants «pas favorables du tout».

Si la possibilité de se faire vacciner en pharmacie devenait une réalité, les ¾ des répondants affirment qu’ils l’exploiteraient (dont 43% «très probablement»). Les auteurs quantifient cette «déclaration d’intention» en prenant l’exemple de la vaccination antigrippale: rien que pour cette dernière, une part de ¾ de vaccinations qui s’effectueraient chez le pharmacien «correspondrait à 3,8 millions de vaccinations par an, soit plus de 170 par officine».

Il faut savoir que l’élargissement du droit de vaccination aux pharmaciens (réservé en France aux médecins, mais aussi aux infirmiers et sages-femmes dans des circonstances bien définies) a été envisagé dans l’une des premières versions de la loi-santé adoptée début d’année. Justification des autorités: s'appuyer sur le réseau des quelque 22.000 officines du pays permettrait d’améliorer la couverture vaccinale de la population. Les parlementaires ont par la suite retouché le projet de loi et supprimé cette perspective, mais l’Académie nationale de pharmacie, persuadée de l’intérêt du dispositif, remet régulièrement la question sur le tapis.

«En étroite collaboration avec les médecins»

L’an passé, elle a produit un argumentaire détaillé, avec référence à ce qui se pratique dans certains pays étrangers (Royaume-Uni, Portugal, Suisse, États-Unis ou Canada), pour soutenir cette option. Elle souligne principalement que «les pharmaciens sont, pour le public, les plus accessibles des professionnels de la santé» et que «dans tous les pays où les pharmaciens ont l'autorisation de vacciner, la couverture vaccinale a été notablement améliorée». L’académie concède que l’implication des pharmaciens dans la vaccination ne doit se concevoir qu’en «étroite relation avec les autres professionnels de santé, les médecins en particulier».

On peut formuler une série de réserves quant à l’étude mentionnée en début d’article. Elle a été co-organisée par une société sectorielle dont on peut douter de la neutralité, sans correction de l’échantillon pour garantir sa représentativité (il compte ainsi quasi 70% de femmes…), via un formulaire auto-administré (sur un ordinateur portable confié au patient par le pharmacien, à remplir sous son nez, peut-on supposer…) et avec des questions parfois évasives, notamment sur qui vaccine, précisément, dans l’officine. Le site des infirmiers libéraux français Infilib regrette à ce propos que l’on n’ait pas titillé les répondants sur leur préférence entre se voir injecter un vaccin par «une infirmière diplômée ou une préparatrice en pharmacie». 

Il n’en demeure pas moins que, même en fermant les yeux sur les libertés méthodologiques qui ont aidé un point de vue très favorable aux pharmaciens à émerger, les chiffres avancés étonnent par leur ampleur. On parle quand même de huit personnes sur 10 favorables à une vaccination en officine. Le débat aurait assurément besoin d’être posé, calmement, largement, dans ses différentes composantes et éclairé par des études neutres. 

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