Le troisième atelier d’échanges du programme Teckn 2030 in Action" avait choisi deux thèmes: la prise en compte des biais qui impactent les services de santé et l’exploitation des savoirs des professionnels de santé - multiples, épars, parfois spécifiques.
Les ateliers "Teckno 2030 in Action" ont pour objectif de faire émerger des idées et bonnes pratiques, venues des utilisateurs et destinataires de solutions e-santé, afin de favoriser des solutions qui soient réellement au service du citoyen et de la société. Et ce, en respect des huit principes directeurs “pour une technologie saine à dimension humaine” définis dès 2020 par la Fondation Roi Baudouin et le fonds Dr Daniël De Coninck.
Brouillage par les biais
Katerina Zekopoulos, consultante et co-fondatrice du cabinet en intelligence culturelle français Animo CQ, abordait la question des biais et stéréotypes en matière de santé. Des biais qui peuvent profondément impacter la prise en charge, la délivrance des soins mais aussi le regard porté sur les maladies et les patients.
Un exemple qui concerne directement l’opportunité de solutions d’e-santé: cet a priori simplificateur et tenace qui veut que “les seniors sont forcément peu compétents, perdus face au numérique, incapables d’apprendre à utiliser ces outils”.
Les biais influencent aussi la manière dont les professionnels de santé s’adressent aux patients et, au-delà, dont les solutions technologiques sont conçues et mises en oeuvre. “Il en résulte une baisse de la qualité de service et de l’accessibilité aux soins”, prévenait Katerina Zekopoulos.
Comment y remédier ou éviter de telles embûches ? “Former les acteurs de santé au sens large. Leur procurer conseils, accompagnement et procéder à des audits.” Quant à l’action à mener vis-à-vis des développeurs de solutions, “l’une des solutions consiste à tester les interfaces avec les utilisateurs finaux, à recueillir leurs retours pour se prémunir contre les biais. Cela commence par exemple par le design participatif.”
Faire naître des communautés de pratiques
Comprendre et “capter” les apports des professionnels de santé n’est pas forcément chose évidente. Leurs savoirs sont nombreux mais éparpillés, fragmentés. Parfois mal réconciliés. Souvent sous-exploités.
Kevin Boulanger, médecin généraliste liégeois - l’autre orateur de l’atelier Teckno 2030 -, identifie plusieurs écueils dans notre système de santé. Notamment “un manque de connexion entre système de soins et système d’aide, un manque de cohérence sur la vision qu’on a d’une maladie ou d’un traitement quand on passe d’un praticien à l’autre, ou encore la difficulté à se mettre d’accord lors de l’échange de savoirs complexes.
Le secteur de la santé est fortement dominé par le principe d’EBM (evidence-based medicine), de preuves apportées dans le cadre de publications dans des revues de renom. Et ça marche… Mais quand on prend une décision à propos d’un patient, nos décisions sont fondées sur ces “vérités” tout en étant colorées par le vécu du patient, notre propre expérience en tant que professionnel de santé”.
Autant d’écueils qu’il a voulu lever en créant une communauté de pratiques, hébergée sur une plate-forme en-ligne: WeLinkCare. “Chacun a un éclat de vérité. La communauté de pratiques permet d’échanger, de passer à une plus grande échelle que ce que permet un échange de savoirs en santé autour d’une table. Même en configuration multidisciplinaire.”
WeLinkCare aujourd’hui, ce sont près de 2.800 membres - majoritairement des professionnels de santé mais aussi des institutions de soins.
Les échanges portent sur les connaissances, y compris complexes, mais aussi sur les savoir-faire. “La technologie permet de garantir une accessibilité au savoir-faire, une diffusion rapide et ciblée [au sein de la communauté], procure une meilleure collaboration, un partage de connaissances complexes mais aussi d’apprentissages spécifiques à plus grande échelle.”
De ces échanges et partages doit naître potentiellement une meilleure perception de ce qui est réellement utile, selon les contextes et objectifs.
Comment expliquer la technologie
Le 22 juin aura lieu la 4ème rencontre de "Teckno2030 in Action". Elle se tiendra à la Fondation Roi Baudouin de 10 à 12 heures. Charline Maertens du KCE parlera du comment mieux identifier les besoins, non rencontrés des patients afin que notre système de santé réponde davantage à la demande qu'à l'offre.
AN Jacobs , professeur à la VUB , parlera de la notion d'explicabilité de la technologie dans l'IA. Pour elle, plus une technologie est explicable, plus elle a de chance d'être utilisée et adoptée sur le long terme.
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