La Fédération des Associations de Généralistes Wallons (FAGW) tire la sonnette d'alarme concernant l'absence de représentation des médecins généralistes au sein du Conseil National des Soins Médicaux Urgents (CNSMU), un organe clé dans l’organisation des gardes médicales. Pour le Dr Guy Delrée, président de la FAGW, cette exclusion illustre une méconnaissance profonde du rôle des généralistes et de la réalité du terrain.
Le CNSMU est chargé de conseiller le ministre sur l’organisation pratique des gardes en médecine générale et le fonctionnement du tri des appels d’urgence. Il est composé en majorité de personnes étrangères à la médecine générale francophone (directions de centrale, urgentistes, infirmiers…). Or, ce sont les généralistes eux-mêmes qui sont en première ligne pour répondre aux demandes de soins non programmables, en particulier lors des nuits et des week-ends. Pourtant, les généralistes francophones ne disposent d'aucune voix directe au sein de cet organe. Leur voix est seulement consultative. Les généralistes flamands sont mieux représentés, mais ils connaissent une réalité différente.
« Il est incompréhensible que ceux qui sont les plus impliqués dans les gardes de médecine générale ne soient pas consultés sur leur organisation », déclare le Dr Delrée. « Cette situation entraîne des prises de décision qui ne reflètent pas la réalité du terrain, ce qui complique encore plus nos conditions de travail déjà difficiles. »
Une représentation nécessaire pour des décisions éclairées
La FAGW a pris les devants en envoyant une lettre officielle au CNSMU, réclamant une représentation effective des médecins généralistes francophones dans les débats, avec un vrai poids et une autonomie dans les matières qui les concernent. La Fédération souligne que sans leur participation, les décisions relatives à l’organisation des gardes médicales manquent de perspectives essentielles et peuvent aboutir à des mesures inadaptées.
« Nous sommes les premiers à intervenir lors des urgences non vitales, et nous connaissons mieux que quiconque les défis que cela implique », explique le Dr Delrée. « Il est donc impératif que nos voix soient entendues et que nous ayons un poids réel dans les discussions qui concernent nos pratiques et la gestion des urgences de la médecine générale. »
« Parmi les demandes », dit encore le président de la FAGW, « figure celle de renvoyer à leur médecin traitant les patients qui appellent pour un motif léger (N7) après 23h la veille d'un jour ouvrable. Les médecins généralistes de garde se veulent disponibles pour ce qu'il est nécessaire de voir en nuit, où le contact à cette heure-là apporte une vraie plus-value en termes de santé (soins palliatifs, MRS...). Pour le reste, il faut ramener le travail de routine vers les heures ouvrables, peu importent les raisons non médicales d'un appel en dehors de ces heures (convenances personnelles, patient subitement pressé, impatience...). Cette demande concrète et de bon sens n'est hélas pas audible pour le CNSMU. Or, résoudre ce type de problème relatif à la garde est nécessaire (mais pas suffisant) pour lutter contre les pénuries, a fortiori dans les zones rurales. »
Un impact négatif sur le terrain
L'absence de représentation des généralistes au CNSMU contribue non seulement à une organisation inefficace des gardes, mais elle risque également d’aggraver la pénurie de médecins, notamment dans les régions à faible densité médicale. Ces zones, où les conditions de garde sont les plus pénibles et où la rémunération est faible, peinent déjà à attirer de jeunes médecins.
« Nous avons un besoin urgent de conditions de travail plus attrayantes pour encourager les jeunes médecins à s’installer dans ces régions et à participer aux gardes », avertit le Dr Delrée. « Sans une meilleure prise en compte de notre réalité dans les instances décisionnelles, ces régions risquent de souffrir encore davantage. »
Le 1733 devient le « night and day de la médecine générale »
La FAGW critique également le fait que le 1733, initialement destiné à faciliter l'accès aux soins non urgents de médecine générale, s’est éloigné de sa vocation première. Il devient une sorte de « night and day de la médecine générale ». Selon la fédération, une méconnaissance des spécificités du métier de généraliste au sein du CNSMU a contribué à des dérives qui compliquent la gestion des appels d’urgence et détournent les ressources des postes de garde.
« Le 1733 devait être un outil au service de la garde de médecine générale, mais il a perdu son sens », regrette le Dr Delrée. « Sans des décisions basées sur une compréhension profonde de notre métier, les systèmes que nous utilisons deviennent inefficaces, voire nuisibles à la qualité des soins. »
Un appel au dialogue et à la réforme
La FAGW, tout en réaffirmant son engagement envers la population et sa volonté de garantir des soins de qualité, plaide pour une réforme en profondeur de l’organisation des soins d’urgence. Pour ce faire, elle exige que les généralistes obtiennent une place légitime au sein des instances décisionnelles comme le CNSMU. Seule une représentation adéquate pourra garantir que les réalités du terrain et les besoins spécifiques des médecins généralistes soient pris en compte.
En conclusion, la FAGW espère que leur appel sera entendu et que les autorités comprendront l'importance de leur participation pour l’élaboration de politiques de santé justes et efficaces. « Le temps est venu de reconnaître pleinement le rôle des généralistes dans les soins d'urgence et de les inclure dans les décisions qui façonnent leur quotidien », conclut le Dr Delrée.
> Lire la lettre de la FAGW au CNSMU
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