Un quart des carabins français se disent en mauvaise ou moyenne santé

Comment se portent les étudiants en médecine? Telle est la question que se posait l’Ordre des médecins français. A l’issue d’une enquête exclusive à laquelle ont pris part quasi 7.900 étudiants et jeunes médecins, il conclut à l’existence d’une forme de souffrance, notamment en 2ème cycle, et à des contacts parcimonieux avec la médecine du travail, universitaire et générale.

La commission «jeunes médecins» de l’Ordre a noué des partenariats avec les principales structures représentatives des étudiants en médecine et des jeunes médecins pour conduire une enquête inédite en France «tant par son sujet que par son ampleur». Des réponses de 7.858 étudiants et jeunes médecins ont émergé quelques constats troublants. Par exemple, 24,2% des répondants évaluent leur état de santé comme moyen ou mauvais, un pourcentage qui passe à 30,8% en second cycle (*). 14% rapportent avoir déjà eu des idées suicidaires (dont 16% en second cycle, avant que cette part ne régresse). La majorité (55%) de cette double catégorie de répondants vivent seuls, et 39,2% en couple. Parmi les participants admettant avoir déjà songé au suicide, l’Ordre a relevé un usage plus important d’anxiolytiques, 30% d’entre eux déclarant en consommer «souvent» ou «parfois».

L’Ordre rappelle ici les propositions de son Livre blanc sorti en janvier, ayant trait (entre autres) à la formation et permettant notamment de faire découvrir précocement l’exercice de la médecine et de lever l’angoisse de l’inconnu.

Il fait aussi observer le problème de la durée des prestations des internes (les étudiants de 3ème cycle (*)): «Malgré une directive européenne, [leur] temps de travail déclaré reste très majoritairement supérieur à 48 heures hebdomadaires. 39,95% des répondants déclarent travailler entre 48 et 60 heures, 16,04% entre 60 et 70 heures, et 8,65% plus de 70 heures par semaine. Or, le lien entre le temps de travail et la qualité de l’état de santé est puissant, quelles que soient les cohortes examinées.»

Le médecin, ce mauvais patient?

Mais n’y a-t-il aucun professionnel pour organiser la prévention et le suivi de cette population étudiante soumise (comme celle de certaines autres branches aussi d’ailleurs) au stress et aux angoisses propres à ces périodes de vie? Sur les deux années précédant l’enquête, seuls 36% des étudiants ou jeunes médecins avaient rencontré la médecine du travail ou la médecine universitaire, a établi l’Ordre. Et cela ne s’arrange pas au fil du cursus: du côté des post-internats et jeunes professionnels, il n’y en a plus que 22% à avoir sollicité un représentant de ces disciplines.

Est-ce parce qu’ils s’adressent à un médecin de famille? Apparemment pas. Interrogés sur la fréquentation d’un MG sur les 12 mois écoulés, un tiers seulement des participants ont répondu à la question, et la réponse était «non» à 68%! Cette proportion passe à 73% chez les répondants en 3ème cycle et à 78% chez les étudiants en fin de cursus. Quatre répondants sur 10 (39%) ont expliqué n’en avoir «pas le temps», et 15% qu’ils «optaient pour une prise en charge personnelle». 

Pour un réel compagnonnage

L’Ordre a également retenu de ce vaste coup de sonde que 92% des répondants estiment que l’entraide vis-à-vis des jeunes médecins doit être l’une de ses missions. Il s’affirme incité à «une réflexion sans délai sur l’instauration d’un réel compagnonnage dans l’apprentissage du métier». 95% des participants ont également appelé de leurs vœux, dans des cas sévères qui mettent l’un d’eux dans l’incapacité avérée d’exercer la profession et/ou la spécialité à laquelle il se destinait, la création d’un processus de requalification ou de reprofessionnalisation.  

 

(*) En France, les études de médecine sont organisées en 3 cycles: une formation générale en sciences médicales de 3 ans; un  2ème cycle, de 3 ans également, dit de formation approfondie en sciences médicales où se mélangent stages hospitaliers et cours à la faculté (ce que les Français appellent traditionnellement l’externat); et enfin le 3ème cycle, aussi dit l’internat, composé de stages successifs de 6 mois pour une durée globale de 3 à 5 ans,  subordonné au passage des épreuves classantes nationales, qui permettent de choisir sa spécialité et/ou la région où l’on effectue son internat.

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