Quels sont les problèmes de santé pour lesquels les besoins des patients et/ou de la société demeurent importants? Comment déterminer les priorités de la recherche? C'est pour répondre à ces questions que le Centre fédéral d'expertise de soins de santé (KCE) et Sciensano, avec plusieurs autres institutions fédérales, ont élaboré "NEED", un cadre identifiant les besoins non rencontrés en termes de santé.
Ce cadre, dévoilé jeudi, doit "coordonner la recherche sur les besoins non rencontrés" en termes de santé. La médecine a fortement progressé ces dernières décennies, relève le KCE, et s'est concentrée sur "les problèmes les plus courants ou les plus simples à soigner", "un choix logique aussi bien d'un point de vue économique que d'un point de vue médical et sociétal".
Malgré le fait que ces "cibles faciles" ont désormais été atteintes, les innovations restent concentrées sur "des domaines déjà bien explorés, en particulier ceux qui concernent un grand nombre de patients ou dont les risques financiers sont relativement limités". La plus-value de ces recherches n'est que "marginale pour les patients et la société, ce qui représente une utilisation peu efficiente des moyens publics et privés".
Il faut désormais changer de stratégie et diriger la recherche vers les besoins qui ne sont pas encore rencontrés. C'est l'objectif de l'initiative NEED, pour "besoin" en anglais mais également l'acronyme de "Needs Examination, Evaluation, and Dissemination" .
Cette base de données européenne, "accessible à tous", rassemblera des informations scientifiques sur ces besoins non rencontrés. Le but est "d'éclairer les choix des décideurs politiques et des acteurs de la santé". Une aide salutaire alors que "les moyens disponibles" dans ce domaine sont "limités", souligne le KCE.
Concrètement, ce cadre d'évaluation "est une sorte de canevas" pour "collecter les données nécessaires d'une manière scientifique, structurée et harmonisée". Vingt-trois critères ont été identifiés et sont mesurés au moyen d'un ou plusieurs indicateurs, pour lesquelles les sources d'information les plus appropriées sont renseignées (littérature scientifique, avis d'experts, enquêtes, entretiens individuels avec les patients...).
Un critère peut par exemple être "l'impact de la maladie sur la santé physique des patients", qui peut être mesuré par la "pénibilité ressentie des symptômes physiques" ou encore la "survenue ou l'aggravation de douleurs", illustre le KCE. Un autre peut être "l'impact sur l'éducation", mesurée par le "nombre d'années d'études perdues à cause de la maladie".
Ces critères "visent très large" et recouvrent les besoins des patients, de la société ainsi que ceux anticipés pour le futur. "Ils s'intéressent aux répercussions à la fois directes et indirectes de la maladie au travers de son impact sur la santé individuelle et collective, des besoins de soins et services de santé qu'elle engendre et de ses implications sociales (comme son impact sur les relations interpersonnelles, les études, le travail ou les revenus, l'impact environnemental de son traitement...)."
L'outil a été testé pour la maladie de Crohn et le mélanome malin . "Une étude supplémentaire a confirmé qu'il peut également être utilisé dans le contexte particulier des maladies rares, à condition de prendre en compte certains points d'attention." Le cadre pourra être affiné avec le temps.
Seize États membres de l'Union européenne "ont déjà exprimé leur soutien explicite" à cet outil. Une conférence européenne sera également organisée à ce sujet à la mi-avril, dans le cadre de la présidence belge du Conseil de l'Union européenne.
"Reste à espérer que des moyens suffisants seront dégagés pour rendre possible des recherches scientifiques approfondies sur un maximum de pathologies", conclut, réaliste, le KCE.
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